à 7 000 étudiants

La hausse sera bien progressive

Publié le 03/05/2004
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C'EST UNE CERTITUDE, le numerus clausus à l'issue de la première année de médecine (Pcem1) sera porté à 7 000 étudiants. Le ministre de la Santé et de la Protection sociale l'a annoncé la semaine dernière devant l'Assemblée nationale (« le Quotidien » du 30 avril). Philippe Douste-Blazy a juste oublié de préciser quand cet objectif devrait être atteint. Pris de court par une mesure présentée sans concertation avec le ministère de l'Education nationale, l'Avenue de Ségur était bien en peine d'en dire plus. « Le calendrier de cette mesure n'est pas encore arrêté », indiquait-on simplement au ministère de la Santé.
Philippe Douste-Blazy a déclenché un coup de tonnerre dans le milieu médical. Son annonce a paru d'autant plus brutale que son prédécesseur avait manifesté l'intention d'augmenter par tranches de cinq cents le nombre d'étudiants admis à passer en deuxième année des études de médecine. Jean-François Mattei prévoyait de suivre les recommandations du rapport Berland sur la démographie des professions de santé et d'atteindre un seuil de 7 000 à 8 000 étudiants d'ici à quelques années.
Surpris par une annonce qui a suscité de nombreux appels téléphoniques d'étudiants, d'enseignants et de doyens, le ministère de l'Education assure que la hausse du numerus clausus ne s'effectuera pas d'un seul trait. Au terme de cette année universitaire, ce sont bien 5 600 étudiants - comme prévu - qui seront admis à passer en deuxième année. Dans l'entourage de François Fillon, on précise que les concertations entre les ministères de la Santé et de l'Education ne font que commencer pour déterminer le numerus clausus de 2005 dont l'annonce devrait intervenir en septembre ou octobre. Une rencontre est d'ailleurs prévue cet après-midi entre les représentants des doyens des facultés de France et les conseillers techniques aux études médicales des deux ministères. Le Dr Jean-Paul Francke, secrétaire général de la Conférence des doyens, confirme avoir l'assurance que la hausse du numerus clausus à l'issue du Pcem1 sera progressive : « Il n'y a pas de rupture brutale avec la politique de Jean-François Mattei. L'augmentation s'effectuera par paliers, en plusieurs années. Passer d'un numerus clausus de 5 600 à 7 000 en un an n'aurait pas été raisonnable. Cela aurait même été injuste pour les étudiants recalés de peu l'année dernière. »
Il y a dix ans, le Pr Bernard Charpentier était parmi les premiers à demander une augmentation du numerus clausus, plafonné à un niveau très bas - environ 3 500 - pour limiter le nombre de médecins jugé excessif. Le président de la Conférence des doyens se dit très favorable au chiffre de 7 000 avancé par le ministre. Il demande seulement un peu de temps afin de permettre aux facultés d'organiser un accueil optimal des étudiants : « Certains chefs de service se sont récemment plaints du manque d'internes, mais il ne faut pas tout confondre : les étudiants sont là pour être formés, ce ne sont pas des Manpower. »

La crainte des médecins et des étudiants.
Dès l'annonce de Philippe Douste-Blazy, les syndicats de médecins ont affiché leurs réserves quant à une hypothétique hausse de 25 % des effectifs de deuxième année dès la rentrée 2005. La mesure a paru « aveugle et hasardeuse » au président de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf), Michel Chassang. Le Dr Dinorino Cabrera, président du Syndicat des médecins libéraux (Sml), l'a jugée pour sa part « prématurée ». Les associations d'étudiants sont également montées au créneau, pour dénoncer une augmentation aussi subite. « Former davantage de médecins est une nécessité, mais maintenir la qualité de l'enseignement médical et continuer à le faire progresser est essentiel », insistait Amandine Brunon, présidente de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). Olivier Marchand, président de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes en médecine générale (Isnar-Img), abondait en ce sens : « Depuis dix ans, les facs ont perdu des amphis et n'ont pas les moyens logistiques et humains de prendre en charge une augmentation aussi brutale du nombre d'étudiants . » Un doyen parisien mettait en garde contre l'effet attractif que pourrait avoir auprès des prochains bacheliers un numerus clausus trop élevé : « Si le nombre d'inscrits en première année de médecine augmente démesurément, nous ne pourrons pas tous les accueillir. »

Les regrets de la FPS

La France manque de médecins ? La Fédération des praticiens de santé (FPS), tout en étant favorable à l'augmentation du numerus clausus, regrette dans un communiqué que « les pouvoirs publics maintiennent dans une grande précarité tout autant statutaire qu'économique et refuse de reconnaître les trois mille praticiens diplômés hors de l'Union européenne qui exercent actuellement dans les hôpitaux publics, en rendant d'énormes services depuis plusieurs années ». Le syndicat met en avant le sort de ceux de ces médecins « qui ont subi avec succès les épreuves du Csct [Certificat de synthèse clinique et thérapeutique] selon la loi de 1972, notamment en chirurgie dentaire et dans les disciplines médicales, pharmaceutiques et chirurgicales, ainsi que les titulaires du diplôme interuniversitaire de spécialité (DIS) qui ont validé leur spécialité en France, après des épreuves sélectives ».

> CHRISTOPHE GATTUSO

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7533