La neurologie en pratique de ville 24 novembre 2202 Congrès à Paris

La grossesse n'augmente pas le risque de poussée

Publié le 16/12/2002
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Le risque de poussée de sclérose en plaques (SEP) diminue au fur et à mesure de l'évolution de la grossesse, notamment au cours du dernier trimestre. « A telle enseigne, souligne le Dr Olivier Heinzlef, que certains auteurs ont considéré que la grossesse pourrait être le meilleur traitement de la SEP puisque la réduction des poussées au cours du troisième trimestre de grossesse est bien supérieure à celle obtenue avec les traitements de fond. » En revanche, la situation s'inverse après l'accouchement, lors du premier trimestre du post-partum avec une augmentation très significative du risque de développer une poussée.
« Mais globalement, remarque le Dr O. Heinzlef, sur neuf mois de grossesse et les trois mois du post-partum, la moyenne du taux de poussées est sensiblement similaire à celui observé avant ou après la grossesse. Autrement dit, on peut considérer que la grossesse et son suivi immédiat représentent sur le long terme un événement nul, en termes de poussées. »
Quant à l'évolution du handicap elle n'est pas modifiée de façon significative par la grossesse. Avec 10 à 15 ans de recul, l'événement grossesse à un moment donné de la vie d'une patiente ayant une SEP n'a pas d'impact sur la progression du handicap, par rapport à l'évolution globale de la SEP.

Pas de complications obstétricales spécifiques

L'étude la plus récente (Mueller et coll., 2002) montre qu'il n'y a pas plus de complications obstétricales spécifiques pendant la grossesse, l'accouchement ou le post-partum chez les femmes atteintes de SEP que chez les témoins indemnes de pathologie neurologique. Les patientes peuvent, en outre, bénéficier sans risque particulier d'une anesthésie péridurale ou d'une césarienne.
Elles peuvent également allaiter leur enfant. Pour des raisons mal élucidées, il semble que les femmes qui allaitent ont une fréquence moindre de poussées par rapport à celles qui n'allaitent pas. Mais ajoute le Dr O. Heinzlef, « cela ne signifie pas que l'allaitement protège des poussées ».
Si une poussée de SEP survient pendant la grossesse, il est préférable de traiter par corticoïdes per os plutôt que par voie I.V. en raison du risque de fausse couche spontanée liée au bolus. En outre, précise le Dr Heinzlef, « l'impact d'une corticothérapie per os courte, de 15 jours à 3 semaines, est quasi nul pour le fœtus, quelle que soit la période de la grossesse ».
Sachant qu'après l'accouchement, le risque de poussées augmente de façon importante, le traitement de fond doit être repris le plus tôt possible (s'il était institué avant la grossesse), sauf si la patiente décide d'allaiter, et en laissant passer la période immédiate du post-partum souvent marquée par le « baby-blues ».
Certaines propositions thérapeutiques sont à l'essai pour prévenir le risque de poussées dans la période du post-partum en particulier du solumédrol de façon systématique ou un traitement par estriol pour obtenir un taux similaire à celui observé pendant la grossesse. D'autres équipes ont proposé des immunoglobulines par I.V. juste après l'accouchement, ce qui pose le problème de l'éventuelle transmission d'agents pathogènes identifiés ou non.

D'après une conférence du Dr Olivier Heinzlef, Paris.

En pratique

- A quel moment une femme atteinte de SEP peut envisager une grossesse ? La réponse repose sur une analyse individuelle qui prend en compte l'activité de la maladie et le contexte familial.
- Quel délai entre la dernière poussée et la mise en route d'une grossesse ? Il est assez difficile à fixer. Il faut tenir compte du fait qu'un traitement de fond (comme l'interféron) peut se révéler nécessaire en raison de l'activité de la maladie. Ce médicament contre-indique alors la mise en route d'une grossesse pour une période de un à deux ans.
- Quel intervalle entre l'arrêt d'un traitement de fond et le début d'une grossesse ? Il peut être assez court : un mois est un délai raisonnable, qui expose peu à une poussée entre l'arrêt du traitement et le début de la grossesse.
- Quel risque pour l'enfant de développer une SEP ? Il est de l'ordre de 2 %, chiffre très supérieur au risque de la population générale, mais bien inférieur au risque de toutes les maladies dites héréditaires.

Dr Martine ANDRE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7241