Lors de la grande grève des gardes de l’hiver 2001-2002, la Basse-Normandie s’était illustrée par son activisme.
Treize ans plus tard, la région est tout aussi mobilisée, cette fois contre le projet de loi de Marisol Touraine. Aujourd’hui à la tête de l’URPS « médecins libéraux » de la région, le Dr Antoine Leveneur (FMF) faisait déjà partie en 2001 des coordinations qui mirent le feu aux poudres. C’est dire s’il connaît la musique.
En Basse-Normandie, la grève des gardes a démarré pendant les fêtes, avec le mouvement de fermeture des cabinets libéraux. « Mais depuis le 2 janvier, en plus de la grève de la télétransmission, précise-t-il au « Quotidien », le front syndical uni a décidé à l’unanimité sa reconduction ». Ce front uni rassemble la FMF, la CSMF, le SML, Le BLOC, MG France et l’UFML. Une belle unanimité régionale, alors qu’au niveau national, seule la FMF défend pour l’instant le principe de cette grève des gardes.
La région comprend trois départements (Calvados, Manche, Orne), divisés en 21 secteurs de garde. Depuis 2014, la PDS ambulatoire s’y limite aux week-ends et jours fériés. En semaine, après 20 heures, les régulateurs libéraux orientent soit vers les urgences, soit vers le conseil téléphonique. « Ici, c’est l’union sacrée, assure le patron de l’URPS. Nous avons 100 % de grévistes, en ambulatoire comme en régulation ou en établissements, mais un peu moins chez les urgentistes libéraux ».
La saturation est proche (ARS)
L’accès aux soins semble assuré. « Le début de la semaine du 5 au 11 janvier a été assez dur, reconnaît Vincent Kauffmann, directeur général adjoint de l’ARS Basse-Normandie. Les urgences sont chargées, les pathologies saisonnières arrivent, la saturation des lits est proche, mais la sécurité des patients est assurée ».
L’annonce de la poursuite de la grève des gardes a sans doute amené un certain nombre de patients à aller directement aux urgences. Vincent Kauffmann le reconnaît : « Nous demandons au préfet de réquisitionner pour chaque absence dans un secteur de garde ambulatoire, dans le tableau des régulateurs libéraux et dans celui des établissements ». Les praticiens sont rémunérés en cas de réquisition.
Les grévistes s’organisent. Avec l’aide de l’URPS, ils s’arrangent pour ne transmettre qu’au tout dernier moment les tableaux de garde à l’ARS. Cette procédure contraint la gendarmerie à délivrer les réquisitions en mains propres aux professionnels de santé, celles-ci ne pouvant réglementairement être adressées par courrier que 15 jours au moins avant leur date d’exécution. « C’est une petite guerre d’usure », reconnaît le Dr Jean-Paul Hamon, patron de la FMF.
« On ne lâchera rien »
Le directeur adjoint du SAMU 14, le Dr Daniel Bonnieux, juge cependant la situation moins tendue aujourd’hui que pendant les fêtes, quand la grève des gardes se doublait de la fermeture totale des cabinets libéraux.
Le CHU de Caen avait alors dû mettre en place une consultation de médecine générale pour faire face à la demande de soins. « Pendant cette période, c’était chargé, se souvient-il, les gens ne savaient plus trop où aller ».
Le mouvement va-t-il durer ? « On ne lâchera rien », assure Antoine Leveneur. Vincent Kauffmann, directeur général adjoint de l’ARS, confirme : « Tant chez les généralistes que chez les spécialistes, le mouvement est particulièrement suivi, et les professionnels de santé sont très structurés ».
Tôt ou tard, il faut savoir terminer une grève, mais les praticiens de Basse-Normandie n’en sont pas là. « Il y a une froide détermination des libéraux, juge Antoine Leveneur. En 2001, c’était une joyeuse pagaille, aujourd’hui, nous sommes organisés, et nos patients nous soutiennent. J’ai prévenu le préfet que nous étions partis pour 3 ou 4 mois s’il le faut. Ou bien Touraine retire sa loi, ou bien on continue ».
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