Demain et après-demain, de très nombreuses cliniques devraient cesser leurs activités de consultations, d'urgences, d'admissions et d'opérations programmées, afin de tenter de faire plier le gouvernement à qui leurs dirigeants demandent une enveloppe financière de 6 milliards de francs pour permettre à leur personnel de parvenir à un niveau de rémunération équivalent à celui pratiqué par le secteur public.
L'objectif est d'enrayer la pénurie de personnel qui met en péril ces établissements, de nombreux salariés préférant aller travailler dans les hôpitaux. « Certaines régions comme l'Aquitaine ou Midi-Pyrénées participeront à 100 % à la grève, prévoit le Dr Philippe Cuq, l'un des responsables de la Coordination nationale des médecins exerçant en clinique (CNMC), à l'origine du mot d'ordre avec la Fédération de l'hospitalisation privée. Même en Rhône-Alpes, qui apparaît parmi les plus en retrait, la participation pourrait être de l'ordre de 70 % ».
L'Ile-de-France, traditionnellement difficile à mobiliser, devrait, elle aussi, être active. « J'ai senti une grande compréhension du corps médical et de nos salariés dans la plupart de nos deux cent dix-neuf établissements, témoigne le Dr Roger-Ken Danis, président de la FHP d'Ile-de-France. A vue de nez, 70 % d'entre eux feront grève, mais même si c'est 50 %, ce sera une grande victoire. Les dirigeants des entreprises et les médecins n'ont pas une culture intense de la grève, il faut vraiment les pousser à bout pour en arriver là. » Certaines cliniques, comme Ambroise-Paré, à Neuilly, sont très mobilisées. Trois mille infirmières manquent en Ile-de-France, dont mille dans les cliniques. Avec l'application des 35 heures à l'hôpital, la FHP calcule qu'il en manquera deux mille de plus. « Cela fait deux ans qu'on est dans la crise, et le pire n'est pas encore là », s'inquiète le Dr Danis.
Soutien des médecins libéraux
Dans une lettre adressée à la FHP, l'Association des cliniques indépendantes de France (ACIF) - qui regroupe 80 établissements - propose que, « ensemble », les 1 300 établissements privés annoncent « l'alignement » des salaires sur l'hôpital public à compter du 1er mai 2002. « Dans chaque région, des établissements "alignent" discrètement les salaires de leurs personnels sur ceux de l'hôpital public, mettant ainsi nos établissements en situation de concurrence déloyale et périlleuse. Cet alignement nous est imposé par les salariés sous menace de grève et de conflits en tout genre, et par les cliniques qui ne respectent pas votre convention collective et qui pratiquent de la surenchère sur les salaires sans en avoir les moyens », indique le président de l'ACIF, Jean-Luc Schnoebelen, au Dr Max Ponseillé, président de la FHP. Cette tendance, aux effets jugés dramatiques, a, selon l'ACIF, déjà démarré à Lille, Tours, Perpignan, Narbonne et Montpellier.
Pour leur part, les syndicats de médecins libéraux (CSMF, FMF, SML, MG-France) soutiennent, de manière diverse, le mouvement de grève. Le Dr Pierre Costes, président de MG-France, « comprend » les revendications des médecins des cliniques, en raison de la situation « délicate » des établissements privés par rapport au secteur public. Estimant que les mots d'ordre des organisations professionnelles ne doivent pas être jugés par les autres, il précise néanmoins que la situation des généralistes, « médecins de premier recours, mais aussi de dernier recours, ne leur permettrait pas d'envisager facilement ce type de mot d'ordre ».
Les réquisitions de médecins ont commencé
Le Dr Cuq, de la Coordination nationale des médecins des cliniques, dénonce les réquisitions de médecins par les préfets qui ont déjà commencé en fin de semaine dernière, alors que le mouvement de grève était loin d'être commencé. « Il y a eu 45 réquisitions à Agen », dénonce-t-il. Pour sa part, le Conseil national de l'Ordre des médecins rappelle que si les médecins veulent faire grève, ils doivent s'assurer que la permanence des soins est assurée par d'autres confrères. « Mais sur les principes et le but de ce mouvement, je n'ai rien à dire, indique le Dr Chassort, secrétaire général adjoint. Il me semble, en tout cas, que c'est tout à l'honneur d'une partie de notre profession de faire le travail quand l'autre souhaite faire grève. »
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