AVEC LA NOUVELLE part variable complémentaire du revenu des chirurgiens publics et la rémunération des gardes des médecins hospitaliers en ligne de mire, les urgentistes et les anesthésistes prédisent un mouvement de grève très suivi demain.
«La mobilisation s'annonce très forte dans les petits hôpitaux, dans le Centre, à Paris, à Lyon, en Paca…», prévient le Dr James Brodeur, président du Smarnu (Syndicat des médecins anesthésistes-réanimateurs non universitaires), coorganisateur du mouvement avec l'Amuf (Association des médecins urgentistes de France) et le Snphar (Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs). «Les conditions de travail à l'hôpital sont de plus en plus difficiles, renchérit le Dr Patrick Pelloux, président de l'Amuf ; les médecins vont exprimer leur ras-le-bol d'une politique de démantèlement du statut, politique soutenue par des organisations minoritaires.»
Tandis que deux grosses intersyndicales de PH – la CPH (Confédération des praticiens des hôpitaux) et l'Inph (Intersyndicat national des praticiens hospitaliers) – appellent, elles aussi, à 24 heures de grève des soins non urgents, les urgentistes et les anesthésistes insistent sur le caractère non catégoriel de leur combat. «La part variable s'inscrit dans une logique ultrapersonnelle, ultra-égoïste», déplore le Dr Pelloux ; et le Dr Michel Dru, qui préside le Snphar, renchérit : «La grève de demain n'est pas antichirurgicale, nous nous adressons à tous les médecins hospitaliers. La part variable répond par des retombées individuelles à un engagement collectif. Or, plutôt que de remplir l'escarcelle de quelques-uns, il faut que ces retombées soient collectives et redistribuées au plus grand nombre, par exemple sous forme de moyens financiers pour la FMC ou l'EPP [évaluation des pratiques professionnelles], qui sont des garants de la pérennisation de la qualité de nos pratiques.»
Que ce soit sur le fond ou sur la forme, la part variable salariale accordée aux chirurgiens (jusqu'à 15 % de rémunération supplémentaire en fonction d'objectifs de qualité et d'activité fixés par contrat avec l'administration- « le Quotidien » des 2 et 5 avril) ne trouve décidément aucune grâce aux yeux de ses détracteurs qui la qualifient au mieux d' «usine à gaz» et au pire de poudre aux yeux. «Elle est coûteuse, inutile et nocive», assène, sans appel, James Brodeur. Michel Dru, pour sa part, s'indigne : «Cette part variable ne paie rien, c'est du vent! La qualité des PH ne peut pas s'acheter, il s'agit de notre premier devoir! A ce titre, la part variable est d'ailleurs insultante. Et elle n'active pas l'attractivité des carrières hospitalières. Car les praticiens attendent autre chose en termes de conditions de travail, de qualité d'exercice… que ces 15% de salaire en plus, une aumône par rapport à ce qu'ils gagneraient en choisissant le secteur privé!»
Des gardes à 450 euros pour tous.
Autre cheval de bataille de l'Amuf, du Snphar et du Smarnu : la permanence des soins (PDS) et, en particulier, la question de la rémunération des gardes. «L'Amuf, explique son président, déplore que le travail de PDS dans les hôpitaux publics ne soit pas valorisé, alors que, pour le monde libéral, les dépassements d'honoraires fleurissent. Nous devons valoriser le travail de nuit, sans quoi, les jeunes générations ne viendront pas dans ces filières à gardes.» Le syndicat estime que les gardes, le travail de nuit, les week-ends et les jours fériés représentent 75 % du temps de travail des urgentistes et demande que l'indemnité de sujétion des PH, mais aussi des médecins à diplôme étranger, passe de 200 à 450 euros, soit le tarif appliqué aux praticiens universitaires. Le Dr Brodeur estime qu'il faut aussi «renégocier les arrêtés sur le temps de travail additionnel» effectué par les PH au-delà des 48 heures hebdomadaires (gardes comprises) et pour lequel le système d'indemnisation ne fonctionne apparemment pas, faute de moyens suffisants.
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