Pratiquement, sur le terrain, le développement du secteur médico-social au détriment du sanitaire s’amplifie. Ainsi, à l’AP-HP, près de 8 000 lits et places à Paris et en région Île-de-France sont spécialisés en gérontologie. L’accompagnement et le soin des malades âgés ont été un des axes prioritaires du plan stratégique 2005-2009 de l’AP-HP. Plus de 1 400 lits et places spécifiques ont été ou sont en cours de création : 150 lits de médecine gériatrique en aval des services d’urgence, plus de 1 000 lits SSR pour favoriser un retour au domicile, 9 équipes d’intervention gériatrique intervenant dans les services et aux urgences pour dispenser une évaluation gériatrique, 50 places d’hôpital de jour gériatriques et de réadaptation, 200 à 400 places d’hospitalisation à domicile (HAD)…
Toutefois, « la transformation de nombre de services et de lits USLD/SSR en Ehpad, explique Marie-Christine Fararik, secrétaire du syndicat Sud à l’AP-HP, pose d’énormes problèmes. Comme les critères d’Ehpad, dont ceux de tarification, ne sont pas les mêmes, les quotas de soignants sont moins importants. C’est donc beaucoup moins médicalisé, sauf que les patients sont très lourds et très dépendants. On a, par exemple, des GIR (Groupe iso-ressources) avec une seule infirmière pour 800 à 1 000 patients Alzheimer/polypathologies. Au point que la direction générale de l’AP-HP vient de décider de stopper tous les Ehpad pour revenir aux USLD. Mais en 2011, il y aura une nouvelle coupe Pathos qui détermine à un temps T les patients relevant de l’USLD ou Ehpad. Seulement, c’est un raisonnement de technocrate car l’état des patients peut se dégrader très rapidement »…
En région, le CHU de Limoges est l’un des plus en pointe en matière de filières gériatriques à l’hôpital, conciliant économies et qualité de la prise en charge3. Ce CHU a créé deux dispositifs afin d’améliorer la prise en charge des patients âgés : une unité mobile gériatrique (UMG) et un service de post-urgences gériatrique (Pug). L’UMG, que l’on retrouve dans d’autres établissements, comprend un médecin gériatre, une infirmière, une assistante sociale, une secrétaire, un cadre de santé et un psychologue. Cette unité prend en charge les patients de plus de 75 ans qui arrivent aux urgences afin d’anticiper leur parcours dans l’hôpital et après leur sortie. L’idée est de raccourcir les délais de prise en charge dans une autre structure, par exemple SSR, pour limiter la durée de séjour à l’hôpital. En revanche, le PUG est une spécificité du CHU de Limoges. Il n’accueille que les patients gériatriques venant des urgences et nécessitant des soins de courte durée avant un retour à domicile ou en attendant d’être admis dans un service spécialisé. Cela évite leur placement dans un service de soins aigus inadapté à leur prise en charge.
Le CHU a également signé des conventions avec six Ehpad de la région, avec deux objectifs : éviter aux pensionnaires des Ehpad signataires de transiter par les urgences en cas d’hospitalisation, permettre aux personnes âgées, suite à une hospitalisation au CHU, d’être prises en charge dans un établissement proche de leur domicile. Le directeur du CHU de Limoges dresse un bilan très positif de cette organisation, aussi bien en ce qui concerne la durée moyenne de séjour des malades âgées (passée de 13 à 7 jours) que le désengorgement des urgences.
Désengorger les urgences
C’est aussi pour désengorger les urgences qu’au CHR d’Orléans, un bâtiment de 40 lits est en cours de construction pour la gériatrie. Quant au nouvel hôpital d’Orléans-La Source, il accueillera, lors de sa première phase d’ouverture en 2012, 120 lits SSR dont 60 supplémentaires, notamment pour les personnes âgées. Plus largement, le CHR d’Orléans gère, via le pôle personnes âgées, quatre établissements : l’Ehpad/USLD du centre de cure médicale de Saran (59 lits SSR gériatriques, 100 lits de soin de longue durée et 100 lits d’Ehpad), l’Ehpad/USLD Résidence Paul-Gauguin à La Chapelle Saint-Mesmin (160 lits dont 60 de longue durée et 100 d’Ehpad), l’Ehpad Résidence Pierre-Pagot à Orléans Saint-Marceau (85 lits), et l’Ehpad Résidence Les Écureuils à Saint-Jean-de-Braye (77 lits).
De son côté, le centre hospitalier de Bretagne Sud à Lorient réorganise aussi son pôle de gérontologie. Tout d’abord, sur les deux centres de gérontologie clinique de Kerbernès à Ploemeur (56), des lits USLD ont été transformés en lits d’Ehpad, soit aujourd’hui 55 lits USLD redéfinis (coupe Pathos) et 55 lits d’Ehpad.
Sur l’un des sites d’Hennebont (56), 30 lits ont été transformés en lits USLD redéfinis et 54 autres en lits d’Ehpad. Une unité cognitivo-comportementale avec 10 lits SSR pour les patients Alzheimer va aussi ouvrir fin 2010. Toujours à Hennebont, deux centres de gérontologie clinique seront regroupés dans un nouveau bâtiment d’une capacité de 200 lits pour une ouverture prévue mi-2012. Dans le cadre de cette réorganisation du CH, plusieurs recrutements à temps partiel sont prévus : médecin, ergothérapeute, psychologue… Ainsi, sur au moins deux Ehpad, un poste de médecin coordinateur gériatre en temps médical partagé devrait être créé. Il pourra s’agir soit d’un médecin libéral, soit d’un jeune médecin intervenant aussi à l’hôpital, pour assurer la coordination de la gestion des Ehpad. Un projet de formation en direction des infirmières et des aides-soignantes des Ehpad est aussi à l’ordre du jour pour améliorer les flux d’admission, comme ceux de sortie des hospitalisations : en effet, le personnel est toujours à la recherche de places.
Faciliter le retour à domicile
De son côté, le centre hospitalier de Blois a ouvert mi-2009 sur le site de l’hôpital un nouvel établissement gérontologique et de réadaptation. Remplaçant les locaux de la maison médicale et ceux de l’Ehpad Croix du Foix devenus trop vétustes, il totalise 210 lits : 100 lits USLD, 50 lits d’Ehpad et 60 lits pour l’unité Alzheimer. Cette construction s’est accompagnée de création de postes : soit 120 professionnels dont 25 infirmières, 57 aides-soignantes et 3 médecins gériatres à temps plein. Cette réalisation est la première tranche d’un projet plus ambitieux qui vise – dans une autre tranche de travaux – à regrouper le court séjour gériatrique, les SSR dont la capacité serait majorée de 25 % pour répondre aux besoins de la population, la médecine physique et de réadaptation avec son plateau technique de rééducation. Une filière complète de gérontologie et de réadaptation sera ainsi placée sur un même lieu géographique.
Au CHU de Nîmes, en revanche, le nombre de lits USLD va être abaissé de 295 à 190 lits USLD. Il est vrai que ce CHU conduit une active politique d’aide au retour à domicile des personnes âgées. Ainsi, en décembre 2009, un accord de partenariat a été signé entre le CHU de Nîmes et l’Arsag (Association pour la recherche de solutions adaptées en gérontologie). Objectifs : « Préserver l’autonomie des personnes âgées, diminuer les risques de morbidité et les pertes de repères liées à une hospitalisation prolongée et privilégier leur retour à domicile plutôt qu’un placement définitif en établissement. » Pour ce faire, au fil des années, le CHU de Nîmes a tissé un réseau de professionnels spécialisés dans l’aménagement de la « sortie » d’hospitalisation du service de soins aigus tant en interne qu’en externe. Avec, en interne : un service social fort de 26 assistants sociaux, un service d’hospitalisation à domicile (HAD) créé en 2008 qui compte 30 places, une équipe gériatrique de suite et d’intervention (Egeri). En externe, des conventions de partenariat ont été signées avec des infirmiers libéraux, des kinésithérapeutes, des associations de suivi à domicile (Aider, Apard). De plus, le CHU de Nîmes a deux projets Alzheimer : ouverture prochaine d’une unité cognitivo-comportementale, et création en octobre 2012 d’un espace Snoezelen (thérapie clinique basée sur les cinq sens) au centre de gérontologie Serre-Cavalier à Nîmes.
Quant à la mise en place de la politique de convergence tarifaire, elle n’est pas sans conséquence sur certains hôpitaux. Ainsi, le CHU de Nantes, dans le cadre de l’équation de mise en convergence de ses unités USLD pour 2016, doit diminuer son budget de deux millions d’euros, soit la suppression potentielle de 50 à 60 postes…
De son côté, le centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger à Aulnay-sous-Bois (93) mène depuis plusieurs années une réflexion approfondie sur l’adaptation d’une filière gériatrique à l’évolution des besoins des personnes âgées couvrant une partie du 93 : Tremblay, Le Blanc-Mesnil, Villepinte, Aulnay-sous-Bois, Sevran, Vaujours et le Bourget. En mars 2008, une consultation d’évaluation gérontologie a été mise en place. Elle accueille toute personne âgée se plaignant d’un problème d’ordre somatique, cognitif, social. Elle permet d’établir un bilan approfondi à la demande des médecins hospitaliers, du médecin traitant, des partenaires médico-sociaux, de la personne âgée elle-même ou de son entourage. Une unité mobile de gériatrie a également été créée en février 2009. Elle est composée d’une gériatre et d’un assistant social, avec un projet de recrutement d’une infirmière d’évaluation, d’un ergothérapeute et psychologue. De plus, en attendant l’ouverture d’une unité de 20 lits, 5 lits de court séjour gériatrique viennent d’ouvrir. Cette première tranche a pour objectif l’accueil pour des raisons médicales et sociales de personnes âgées polypathologiques en perte d’autonomie ou en situation de crise pour un séjour de 10 à 12 jours selon les besoins.
2. Soins de suite et de réadaptation.
3. Rapport du centre d’analyse stratégique, n° 181, juin 2010.
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