Un homme de 89 ans présente une insuffisance respiratoire et doit être placé en réanimation. Mais tous les lits de ce service sont déjà occupés, sauf un, réservé en cas d'urgence pour un sujet plus jeune. L'équipe, alors impuissante, ne peut que surveiller le malade qui finit par mourir.
Ce cas dramatique, survenu dans son service à Dijon, est raconté par le Pr Pierre Pfitzenmeyer, pour illustrer son exposé : « Est-il utile d'avoir un débat éthique alors que l'on sait que l'on ne pourra rien faire ? » dans le cadre de la réunion annuelle des comités et groupes d'éthique.
Réunis au Sénat, les participants ont choisi comme thème de leurs réflexions : « L'éthique face aux contraintes économiques ».
Le Pr Pfitzenmeyer a toutefois précisé qu'il n'a pas voulu démontrer, par l'exemple cité, qu'il existe une préférence entre les âges, mais il reconnaît que lorsque existent dans un service des dysfonctionnements, les inégalités et les problèmes surviennent d'eux-mêmes, et plus naturellement qu'à l'accoutumée.
Les problèmes de place sont, bien sûr, d'ordre structurel et non éthique, mais la réflexion éthique est trop souvent limitée par l'économie. La déontologie médicale commande aux médecins parfois de s'opposer aux règles qui peuvent restreindre l'accomplissement du premier de leur devoir qui est de soigner puis de rendre aux gens une vie décente.
Un secteur peu rentable
Prenant la parole, le Pr M. Berthel, du comité de Strasbourg, a souligné que, si l'éthique n'était pas remise au cœur de la réflexion, « les gestes des équipes médicales risquaient de devenir machinaux ». Il a également mis l'accent sur les problèmes spécifiques des services de gériatrie. En effet, la spécialité, d'un point de vue strictement économique, n'est pas un secteur rentable de l'hôpital. Bien que les taux d'occupation des lits y soient élevés, les durées moyennes d'hospitalisation sont plus longues (22 jours). De plus, au moment de la sortie, les malades hospitalisés sont confrontés à la carence de structures de complément : maisons de retraite et, surtout, soins à domicile.
La gériatrie a aussi le défaut d'être souvent dénigrée par les autres spécialités. Ses services, quoique indispensables, n'attirent pas les nouveaux médecins qui ont l'image d'une spécialité difficile et ingrate avec peu d'occasions de se rendre vraiment utiles.
L'Observatoire national d'éthique, créé en 1995, à la suite d'une décision de Bernard Kouchner, est dirigé par le Dr Véronique Fournier (hôpital Cochin). Constitué à moitié de membres de comités d'éthique locaux et d'une autre moitié de spécialistes du droit des patients, il a pour but de lancer des études de terrain pour cerner, au cas par cas, les déficiences et les problèmes qui se posent dans la pratique.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature