LA FUTURE convention ne provoque pas la colère du président de MG-France, elle le rend bel et bien furieux : « Le ministre de la Santé et le directeur de l'Uncam [Union nationale des caisses d'assurance-maladie] , chargés de conduire les négociations, ont réussi en quinze jours à faire voler en éclats tous les espoirs de la médecine générale : c'est un exploit ! »
Pour le Dr Pierre Costes, il n'y a pas à tergiverser. Le protocole d'accord conventionnel est « une insulte à (sa) spécialité », une pilule d'autant plus difficile à avaler qu'elle n'a été concoctée que « pour activer la signature d'une convention par les syndicats de médecins spécialistes » et selon une recette pour le moins indigeste : « Ce sont les généralistes qui devront faire des économies sur le dos des patients et des professionnels de santé qui les entourent. »
Infligée au moment où la médecine générale est devenue une discipline universitaire, la claque est violente : « On gèle à plus de 40 % le différentiel de rémunération globale entre généralistes et spécialistes. (...) On élargit le C2 de consultant aux anciens CES - c'est-à-dire à des spécialistes qui n'ont pas passé l'internat -, mais pas aux DES de médecine générale... Tout cela frise la caricature ! », s'emporte Pierre Costes.
Sacrifiés.
Devenus spécialistes à part entière, les médecins généralistes espéraient bien voir peu à peu leur rémunération rattraper celle de leurs confrères. Ils assistent aujourd'hui, si l'on en croit le président de MG-France, à la fin de leur rêve : « On tourne le dos définitivement à la progression du C vers le CS, attendue par tous les médecins généralistes, quelle que soit la forme de cette progression. » Le résultat de cette politique serait catastrophique. A court terme, - « on sacrifie les jeunes généralistes en fermant leur avenir, ce n'est pas admissible » - comme à long terme - « ce choix explique a posteriori les 500 postes vacants de l'internat en médecine générale. On veut faire fuir notre spécialité ». Qui voudra, s'interroge Pierre Costes, d'un métier où l'on travaille « 57 heures par semaine (c'est dix de plus que les spécialistes) , où il y a des gardes, des zones difficiles ?»
La forme arrêtée pour le médecin traitant et la fin programmée du médecin référent exacerbe, si c'est possible, la rage du Dr Costes : « On va généraliser de manière obligatoire le médecin traitant à tous les médecins et à tous les patients. Sans la rémunération ni les outils qui doivent aller avec cette fonction. Pire, on va fermer un dispositif déjà rémunéré et basé sur le volontariat [le médecin référent, ndlr] pour donner une victoire idéologique à un syndicat de spécialistes. C'est intolérable. » Quant à la maîtrise médicalisée des dépenses, il est « impossible » de la faire reposer sur les seules épaules des médecins généralistes : elle doit être « partagée avec les pharmaciens pour les médicaments, avec les biologistes, les rééducateurs... ».
En refusant d'adhérer au protocole d'accord signé par la Csmf, le SML et Alliance, MG-France prend - ce n'est pas la première fois de son histoire que cela se produit - le chemin du « hors convention ». Une perspective que le Dr Costes se refuse pour l'instant à envisager. « MG-France, explique-t-il, ira au bout de la négociation et ses instances jugeront de la forme finale des choses. Une assemblée générale, le cas échéant, tranchera. » Au cours des prochaines rencontres avec l'Uncam, le syndicat défendra bec et ongles « le principe d'égalité entre les disciplines ». « C'est un minimum, souligne son président, car nous pensons que la médecine générale devrait être dans le paquet de tête des spécialités avec les chirurgiens, les anesthésistes réanimateurs et les obstétriciens. A nous quatre, nous formons les disciplines essentielles d'un système de santé. » Evidemment, un tel rattrapage a un coût : 1,5 milliard d'euros à investir en trois ans pour les seules consultations, a calculé MG-France ; et deux fois plus si les généralistes voulaient égaler la rémunération des spécialistes, actes techniques compris.
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