POUR LA PRÉSIDENTE de la Fédération nationale des infirmières (FNI), Nadine Hesnart, c'est la goutte qui a fait déborder le vase.
Lors de l'examen de la loi sur les handicapés, le vote d'un texte a été très mal perçu par la profession. Ce texte précisait qu' « une personne durablement empêchée, du fait de limitations fonctionnelles des membres supérieurs en lien avec un handicap physique, d'accomplir elle-même des gestes liés à des soins prescrits par un médecin peut désigner, pour favoriser son autonomie, un aidant naturel ou de son choix pour les réaliser ».
En effet, rappelle la présidente de la FNI, « autant nous sommes d'accord, et nous l'avons dit au ministre, pour que les aidants naturels, c'est-à-dire les proches et la famille, puissent s'occuper très naturellement de la personne handicapée, notamment sur les conseils d'une infirmière, autant nous refusons que cette mission soit confiée à l'importe qui, même si cette personne est choisie par le patient ou un proche du patient ».
Pour la présidente de la FNI, c'est nier le rôle essentiel des infirmières libérales concernant les soins à domicile. Et cela, précise-t-elle, s'ajoute à d'autres dispositions, comme les prélèvements à domicile qui peuvent être effectués par des techniciens de laboratoires, qui ont donné le sentiment aux infirmières qu'elles étaient de moins en moins prises en considération. « Notre profession est une nouvelle fois bafouée », insiste-t-elle. C'est pourquoi la FNI, avec deux autres organisations d'infirmières libérales, l'Organisation nationale des syndicats infirmiers libéraux (Onsil) et le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), a décidé de monter au créneau et d'alerter l'opinion et les élus locaux.
Pour la présidente de l'Onsil, Régina Godart, « il est inacceptable de voir les pouvoirs publics traiter une profession comme la nôtre de cette manière ».
Les infirmières libérales sont d'autant plus courroucées que, selon elles, le gouvernement leur avait assuré que cet article de la loi sur les handicapés ne passerait pas et qu'il s'y opposerait. « Il a suffi que la commission mixte paritaire (qui réunit des députés et des sénateurs et a pour mission de rédiger un texte consensuel en cas de désaccord entre les deux chambres - NDLR) modifie le texte et introduise cette nouvelle notion pour qu'aussitôt les pouvoirs publics baissent pavillon », s'insurge-t-on chez les infirmières libérales. « Est-ce que sept sénateurs et sept députés feraient la loi ? », tempête Nadine Hesnart.
États généraux en juin.
Pour les trois organisations qui mènent cette fronde, la coupe est pleine. « Notre profession est sans cesse malmenée, et cela ne peut durer », insistent-elles. C'est pourquoi elles ont décidé de consulter l'ensemble des infirmières libérales dans les départements et d'ouvrir des cahiers de doléances, avant d'organiser à la fin de juin des états généraux de la profession qui permettront de définir des actions d'envergure, promettent-elles.
Mais déjà les infirmières ont décidé de ne plus soutenir la réforme de l'assurance-maladie du gouvernement et de ne plus participer à des actions de promotion en ce sens.
De même, s'agissant plus spécifiquement de la loi sur les handicapés, les infirmières, à l'appel des trois organisations, pourraient ne pas respecter l'article du texte qui précise que les personnes désignées pour s'occuper d'un patient handicapé doivent au préalable recevoir « de la part d'un professionnel de santé, une éducation et un apprentissage adaptés leur permettant d'acquérir les connaissances et la capacité nécessaires à la pratique de chacun des gestes pour la personne handicapée concernée. Lorsqu'il s'agit de gestes liés à des soins infirmiers, cette éducation et cet apprentissage sont dispensés par un médecin ou un infirmier ».
Pour les infirmières, il n'est pas question, alors que « le rôle de l'infirmière est nié, de participer à ces missions de formation et d'apprentissage ».
D'autant, ajoute Régina Godart, « que notre compétence n'est pas reconnue. Nous ne pouvons accepter de déléguer des soins à des personnes qui n'ont aucune capacité réelle à les assumer et à les assurer. C'est vraiment irréaliste ».
À noter enfin qu'une quatrième organisation d'infirmières libérales, Convergence infirmières, ne participe pas au mouvement de protestation. Ce syndicat est le seul à avoir signé la convention. Un texte rejeté par les autres organisations qui demandent son abrogation.
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