« Les patients ne comprennent pas qu’une nouvelle molécule ne soit pas rapidement disponible dès lors qu’elle a obtenu son autorisation de mise sur le marché. » Pour Marc Ychou, oncologue médical, le verdict est sans appel : « Les délais de mise sur le marché de toute molécule innovante sont beaucoup trop longs. » Pis ! « Ils auraient tendance à se rallonger, avec à la clé la tentation pour de plus en plus de patients d’envisager des situations extrêmes pour pouvoir accéder à ces innovations. »
Liste en sus, 2,8 milliards d’euros
Un avis que ne partage pas Felix Faucon. « En moyenne, une molécule obtient son tarif de prise en charge et peut donc être commercialisée 211 jours après avoir obtenu son autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne », explique ainsi le directeur général adjoint de la DGOS (Direction générale de l’offre de soins). Une période toutefois nettement supérieure aux 180 jours prévus par la directive européenne en vigueur.
Tout en regrettant ces délais trop longs, Patrick Tilleul, pharmacien hospitalier à La Pitié-Salpêtrière (AP-HP), considère également que la France n’est pas hermétique aux innovations.
La raison de cet optimisme apparent ? « Les hôpitaux publics et privés achètent davantage de molécules via la liste en sus que dans le cadre du forfait hospitalier qui est le mode normal d’achat des médicaments. » Car l’Hexagone a pour particularisme de permettre aux hôpitaux de se procurer des molécules innovantes hors budget. Conséquence : « Les hôpitaux achètent sur la liste en sus pour 2,8 milliards d’euros de molécules innovantes, alors que les achats de médicaments n’excèdent pas 2,5 milliards dans le cadre des forfaits hospitaliers », précise Felix Faucon.
Anticancéreux, 1,42 milliard d’euros
Un particularisme dont profite largement la cancérologie puisque les anticancéreux représentent plus de la moitié des achats de médicaments réalisés sur la liste en sus, avec 1,42 milliard d’euros. Et cette prépondérance de l’oncologie se manifeste aussi au regard du nombre de molécules innovantes, puisque sept anticancéreux figurent parmi les dix médicaments les plus consommés. Et pour cause ! « Le mécanisme des autorisations temporaires d’utilisation (ATU) permet de commercialiser des molécules innovantes au prix fixés par le laboratoire », précise encore Felix Faucon.
Un avantage non négligeable à l’heure où les innovations de rupture sont peu nombreuses. Pour preuve : sur les sept anticancéreux – quatre sur les neuf produits ayant reçu une ASMR 1/2/3 et trois sur dix spécialités ayant obtenu une ASMR 4 – six ont bénéficié d’un financement au titre de l’innovation. À charge pour les pouvoirs publics d’envisager les mesures d’économies nécessaires pour pérenniser l’accès à l’innovation.
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