E N France, pays riche s'il en est, les enfants et les adolescents ont des droits qui impliquent des devoirs pour la communauté nationale et les pouvoirs publics en particulier.
Selon des enquêtes INSEE et INSERM, « 7 % des élèves de 11 à 16 ans se disent déprimés et 75 % se plaignent de dépression ou vivent des sentiments d'anxiété », rapporte Marie-Thérèse Hermange, représentante de l'Elysée au Comité de préparation du Sommet des enfants qui devait avoir lieu à New York, dans un rapport destiné au chef de l'Etat et à la ministre de l'Enfance et de la Famille. « Notre pays a ainsi le triste privilège de se classer parmi ceux dont la mortalité des jeunes par suicide est la plus forte en Europe », commente la députée européenne RPR, qui constate par ailleurs que la consommation de drogues « s'est popularisée parmi la jeunesse » au cours de ces dernières années. L'Hexagone épinglé pour cause de négligence envers ses enfants, c'est aussi de 12 à 15 % des 10-12 ans qui se trouvent en difficulté sérieuse de lecture, lors de leur entrée au collège, et 33 % des 15-17 ans qui quittent le système scolaire en classe de 3e sans diplôme, affectés par l'illettrisme.
A quoi s'ajoutent 1 885 000 de moins de 18 ans victimes de la pauvreté, dont 37 % appartiennent à des familles nombreuses et 19 % monoparentales. Et la répartition des minima sociaux ne favorise pas les défavorisés, estime Mme Hermange, tout comme l'allocation logement qui, de son point de vue, « renforce les inégalités, du fait de sa faible modulation en fonction du nombre d'enfants ».
Au chapitre de la petite enfance, Mme Hermange dresse un constat critique à partir de quelques éléments. « Sur les 2,2 millions d'enfants de moins de 3 ans, 9 % sont accueillis en crèches, subventionnées par les allocations familiales et 16 % au domicile d'assistantes maternelles agréées. » Or, moins de 20 % des parents qui travaillent ont une fille ou un garçon pouvant accéder à une place d'accueil collectif.
Parmi d'autres insuffisances, qui font courir des risques aux petits Français, le rapport Hermange souligne la maltraitance. Les victimes sont prises en charge « trop tardivement ». Quant aux jeunes relevant de l'Aide sociale à l'enfance, ce sont des « oubliés de la loi instituant la couverture maladie universelle », et la pédopsychiatrie, « un parent pauvre de la médecine ».
Pour un observatoire national
Marie-Thérèse Hermange préconise donc, en tout premier lieu, un « observatoire national de la naissance, de l'enfance et de la périnatalité, véritable unité de veille », sur la prise en charge des grossesses à haut risque et la prévention des troubles du lien mère-enfant. En vue de remodeler la politique d'accueil de la petite enfance, elle propose la création d' « une allocation unique d'accueil » pour tout couple ayant au moins un enfant.
Le développement du recrutement et de la formation des assistantes maternelles est au programme, tout comme l'institution automatique des allocations familiales dès la première naissance. Face à la maltraitance, il faut rationaliser la coordination des intervenants. Enfin, il semble urgent de prendre des dispositions pour remédier « aux déficiences du système de santé ». Constatant que la plupart des médicaments sont préparés pour des publics adultes, le rapport prône la mise en uvre d' « une politique du médicament pédiatrique à dimension européenne ». L'adaptation des structures de prévention à la jeunesse est également un axe prioritaire, avec la mise en place de bilans de santé à 4 ans, 8 ans et à l'entrée en 5e. Sans oublier, conclut Marie-Thérèse Hermange, l'instauration, dans chaque centre hospitalier universitaire, de maisons multidisciplinaires (gynécologie, dermatologie, tabacologie, etc.) spécifiques à l'adolescence.
Le Sommet des enfants
Plus de quatre-vingts chefs d'Etat et de gouvernement devaient participer à la session extraordinaire de l'assemblée générale des Nations unies consacrée aux droits de l'enfant, prévu à New York du 19 au 21 septembre mais dont le programme pourrait être modifié en raison des récents événements.
Le président de la République devait conduire la délégation française, forte, entre autres, de 19 « 10-18 ans », dont 2 handicapés, sélectionnés par concours. De nombreuses ONG et des centaines de jeunes devaient également y participer ; 250 jeunes étaient attendus au Forum des enfants, du 16 au 18 septembre, pour s'exprimer au nom de leurs droits dans le monde d'aujourd'hui, leurs propositions devant être transmises à l'assemblée générale le 21 septembre.
En parallèle, la session extraordinaire devait comporter plusieurs événements, dont la réunion publique du Conseil de sécurité sur les enfants dans les conflits armés à laquelle devait assister Jacques Chirac. Ségolène Royal, pour sa part, était conviée aux trois jours du sommet.
La France en conformité avec la Convention de l'ONU
Plusieurs dispositions législatives françaises, récentes, déjà votées ou en voie de l'être, sont la traduction de mesures figurant dans la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) de 1989, entrée en vigueur dans l'Hexagone en 1990 :
- la loi du 17 juin 1998, relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, instaure des modalités audiovisuelles pour l'audition des mineurs victimes, renforce les peines contre les pédophiles, et plus encore via Internet, et condamne le bizutage : CIDE art. 19,34 et 28-2 ;
- création d'un Défenseur des enfants (loi du 6 mars 2000) : CIDE art. 3.
Le Parlement est en voie de mettre la France en conformité avec la CIDE dans trois autres domaines. Il s'agit de l'aménagement de l'accouchement sous X, avec la création d'un Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CIDE art. 7-1), de l'égalité en matière successorale des enfants adultérins avec les enfants légitimes et naturels (CIDE art. 2-1), et de la réforme de l'autorité parentale, plaçant l'homme et la femme à égalité, y compris en cas de divorce ou de séparation (CIDE art. 9,10,11).
En ce qui concerne l'adoption internationale, la France a ratifié, en 1998, la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants, afin d'éviter toute dérive (CIDE art. 21).
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