Cela fait vingt ans que le Dr Pascal Dureau s’est installé à Vénissieux, une banlieue « à réputation », sise à la périphérie de Lyon. D’abord en solo. Aujourd’hui, ils sont quatre à se partager le cabinet de quartier qu’ils ont aménagé de manière à pouvoir consulter tranquillement.
Car l’insécurité, le praticien l’a vu monter petit à petit. Mais c’est en 1999 que ce généraliste, épaulé par ses confrères et la population de Vénissieux, monte au créneau. Il faut dire qu’un médecin d’un cabinet médical voisin venait de se faire « taper dessus à coups de barre de fer pour lui voler sa carte bleue ».
Manifestation, interpellation des pouvoirs publics, appel au « civisme de nos concitoyens… Le cabinet de médecine générale doit rester un lieu neutre, je n’imaginais pas faire comme une banque avec un vigile planté à côté de la devanture », explique le Dr Dureau. Ce qui n’a pas empêché le généraliste de Vénissieux de développer une véritable expertise en matière de sécurisation de son cabinet.
D’abord, un rideau de fer. Ensuite la condamnation, avec des barreaux, des fenêtres. Puis, « après débat », l’installation d’une caméra dans la salle d’attente. La dite salle d’attente qui a été construite « ni trop grande ni trop petite » et qui ne donne pas un accès direct au cabinet. « C’est notre assistante qui actionne l’ouverture de la porte par un bouton. »
Retour à l’îlotage
Quant aux rapports avec les services de police, le Dr Dureau, a, comme ses confrères, sa ligne d’accès directe au commissariat enregistré parmi ses favoris sur son portable. « Nous sommes aussi en relation avec la mairie » qui envoie ses agents, renouant avec la tradition de l’îlotage. Enfin, côté organisation pratique, les quatre généralistes s’arrangent pour ne « jamais être seul quand on ouvre et ferme le cabinet ». Et à l’arrivée ? « Ben, ça se passe plutôt bien. La preuve, il n’y a pas de trou dans le tableau de garde chez nous. Et il m’arrive encore, d’oublier de fermer ma voiture à clé. En vingt ans, elle n’a jamais été vandalisée. Les gens savent que c’est la mienne, « celle du médecin ». Pour autant, le Dr Dureau ne verse pas dans l’angélisme. « Mais les faits de violence sont principalement commis par des gosses qui s’ennuient. Si on ne leur rend pas le casse du cabinet facile, ça se tasse. »
C’est aujourd’hui une autre conséquence de la réputation de banlieue difficile qui inquiète ce généraliste qui fête cette année, ces cinquante ans tout juste. « Il est très difficile, avec l’étiquette ghetto, de parvenir à attirer des jeunes médecins dans nos cités. Ca va être un vrai problème pour l’avenir. » Quant aux questions de lutte efficace contre l’insécurité, « dans la vraie vie », ça passe par une réflexion entre pouvoirs publics et médecins. Un impératif d’autant plus pratique que les cabinets médicaux doivent répondre aux normes d’accès EPR (établissement recevant du public), notamment pour les personnes handicapées ; ce qui se traduira la plupart du temps par un cabinet qui sera au rez-de-chaussée. « Les rapports avec les services policiers, ligne directe et référent identifié sont aussi des pistes à explorer. Les véritables mesures sécurité sont là, le reste relève plutôt des tentations sécuritaires?», estime le Dr Dureau.
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