DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE
TANDIS que les signataires de la convention médicale discutent avec l'assurance-maladie, la Fédération des médecins de France (FMF) a tiré ce week-end, lors de ses IIes Tribunes libérales, le bilan de ce texte qu'elle juge « hypersophistiqué, hyperadministré, hypercompliqué ».
A Juan-les-Pins, sur ses terres, le président, Jean-Claude Régi, a rassemblé ses troupes. L'occasion de renforcer les mécontentements et dresser des objectifs en vue des élections aux Urml (Unions régionales des médecins libéraux) de 2006. Satisfait des 150 à 200 adhérents qui se sont déplacés au long des trois jours pour participer aux débats, le président estime qu'un « accord a été trouvé sur la stratégie ». « Nous sommes là pour décider de notre contribution au système de santé. » D'où la demande d'anticiper les élections et d'en faire un référendum sur la convention 2004.
Un texte fustigé.
Parmi les différents orateurs qui se sont succédé à la tribune, c'est un spécialiste de la protection sociale, Jacques Bichot, qui a trouvé un écho des plus chaleureux dans la salle. « J'ai été assez marqué par le caractère bureaucratique de cette convention, [qui constitue] un ensemble impressionnant de règles que l'on vous impose et qui compliquent votre profession. » Des mots bus comme du petit lait par les participants, appréciant le regard compréhensif de cet économiste.
Dans un texte élaboré à l'issue des Tribunes, la FMF résume son avis sur la convention qui « instaure unparcours de prix plutôt qu'une coordination de soins », « sanctionne financièrement les spécialistes » et « constitue de facto une restriction à l'accès aux soins ».
« Asticoté avec tact et mesure ».
Il a osé. Dimanche matin, alors que les doutes persistaient encore sur sa venue, Frédéric van Roekeghem est arrivé et un silence s'est installé dans la salle. Les congressistes ont salué sa présence. « Il n'a rien à craindre », confiait le Dr René Pierre Labarrière, généraliste en Haute-Savoie et membre du « canal historique » de la fédération. « Il sait bien que notre syndicat est propre. Ce n'est pas parce que nous n'avons pas signé que nous sommes de mauvais citoyens et que nous n'avons rien à proposer. Nous avons un rôle à jouer. »
Avec courtoisie, les tribuns libéraux ont asticoté le directeur de l'assurance-maladie avec « tact et mesure ». Même le bouillant Jean-Paul Hamon, président de la branche généraliste de la FMF, issu des coordinations, a su mesurer ses ardeurs. Mais tout de même, appuyant leurs « doléances » sur du concret, les congressistes de la FMF ont expliqué les effets (ou plutôt les méfaits) de la réforme. « Dans le Pas-de-Calais, le nouveau parcours de soins a entraîné une évolution des comportements de nos patients », a raconté le Dr Franco Graceffa, généraliste à Arras. « Ils nous demandent parfois, de façon de plus en plus agressive, un papier pour aller montrer leur verrue chez le dermatologue. Et en plus, certains de nos confrères spécialistes affirment vouloir dévisser leurs plaques, du fait d'une forte baisse de leur activité, alors que nous sommes déjà dans une région déficitaire. » Certaines spécialités accusent jusqu'à 45 % d'activité en moins, a précisé le Dr Régi.
« Pour avoir des professionnels de santé qualifiés, il faut bien les payer », a affirmé Frédéric van Roekeghem, avançant toutefois un « manque d'argent » dans les caisses.
« Cette convention est mal vécue, et par les patients et par les médecins eux-mêmes. Nous nous battons pour la valeur de l'acte médical », a résumé le Dr Régi.
Pourquoi le directeur de l'Uncam a-t-il accepté de venir ? La question a été soulevée. « N'est-ce pas un signe quant à notre chance de réussir aux Urml ? », a lancé l'un des tribuns. De fait, Frédéric van Roekeghem, accueilli par le Dr Régi comme « l'homme de la situation » est, semble-t-il, venu prendre le pouls de ce syndicat qui pourrait peser plus lourd qu'il n'y paraît. « Pour moi, la FMF est représentative et donc fait partie de nos interlocuteurs », a assuré Frédéric van Roekeghem.
Sur les starting-blocks, la FMF entend constituer ses listes aux Urml d'ici au 20 janvier.
Elle était reçue hier par le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, et demain par Frédéric van Roekeghem.
Inquiétude sur les transferts de compétences
Les propos sur le nécessaire « transfert de compétences » du Dr Yvon Berland, qui décryptait son récent rapport sur la démographie médicale, ont passablement inquiété les congressistes de la FMF. « On a l'impression qu'il y a un très beau rapport Berland mais... qu'on n'en fait rien », regrette le président Régi. « On essaie de trouver des solutions pour pallier le manque de temps médical, de plus en plus dévoré par les tâches administratives. Mais où va-t-on ? Sommes-nous en train de revenir à l'officier de santé, poste intermédiaire entre le médecin et l'infirmière ? », s'est demandé le président de la FMF.
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