JEAN-CLAUDE RÉGI a tombé la cravate. Veste noire sur chemise blanche, le président de la Fédération des médecins de France (FMF) aborde, décontracté, la dernière réunion d’une « tournée » qui l’a mené successivement à Montpellier, à Nice, à Neuilly, à Fort-de-France, à Lille et à Ajaccio. Rodé à cet exercice, l’homme veut convaincre une trentaine de praticiens réunis à la polyclinique de la Providence à Poitiers des chances de la Fédération de bien figurer au scrutin aux unions régionales des médecins libéraux (Urml).
Revigoré par les derniers sondages (1), le président de la FMF est volubile. Une heure durant, il présente le programme de son syndicat avant de répondre aux questions de ses confrères. «A la FMF, nous voulons redonner confiance aux médecins qui ne se retrouvent pas dans la convention et les discours politiquement corrects des autres syndicats. Nous présentons des options différentes et demandons que les médecins soient payés au prix de revient de leurs actes.»
S’appuyant sur les résultats d’une récente enquête réalisée par son syndicat auprès de 8 200 médecins libéraux (« le Quotidien » du 6 avril), le Dr Régi rappelle que 71,6 % des médecins n’ont pas le sentiment d’exercer leur métier tel qu’ils l’imaginaient durant leurs études. «Une grande majorité des praticiens réclament un secteur unique à honoraires modulables défendu par la FMF. Nous refusons que la hausse des honoraires soit liée aux possibilités des caisses, mais nous ne sommes pas ultralibéraux comme certains le font entendre.»
Le président de la Fédération plante quelques banderilles à ses rivaux, fustigeant la Csmf d’avoir «engagé la profession à réaliser 1,4milliard d’euros d’économie jusqu’en 2007 pour obtenir 1euro sur le C» en signant l’avenant 12 de la convention. Le SML est également visé, coupable à ses yeux de «quitter le bateau» conventionnel qui prend l’eau. Jean-Claude Régi énumère les dossiers sur lesquels la FMF a mis l’accent pendant sa campagne : le dossier médical «mort-né», l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) «pas financée», mais aussi le régime de retraite complémentaire de l’ASV (avantage social vieillesse), dont le syndicat réclame la fermeture avec maintien des points acquis.
Le Dr Régi veut croire qu’un changement de majorité est possible à l’issue du scrutin qui se clôt le 29 mai. «Notre objectif est très simple: nous voulons mettre fin à la médecine administrative et technocratique, à l’emprise de la Sécurité sociale sur votre travail, nous voulons renégocier cette convention, chef-d’oeuvre de contrôle de la médecine.» Le leader de la FMF prend à partie l’assistance, composée de candidats de la région et de sympathisants. «Nous sommes dans la dernière ligne droite et je demande à chacun d’entre vous de vous investir, d’aller à la pêche aux voix car chacune d’elles va compter. Décrochez votre téléphone, envoyer des mails, communiquez sans cesse. Nous avons tracé une voie libérale, à vous de la saisir!»
Une première.
Créée en novembre dernier, la section de la FMF en Poitou-Charentes présentera pour la première fois des listes pour les collèges généraliste et spécialiste. Elle a bénéficié de l’important soutien des coordinations (Conat et Cnamlib). Le Dr Jean-Philippe Quichon, tête de liste des spécialistes, se veut optimiste. «Nous avons réussi à fédérer de très nombreux médecins, des chirurgiens, des anesthésistes, des ophtalmologues...Ils étaient 55volontaires pour figurer sur notre liste spécialistes de 30noms. Nous avons également bouclé la liste pour le collège généraliste en quatre jours!» Ancien transfuge de la Csmf avec laquelle il a été élu à l’Union en 2000 à 33 ans, le gastro-entérologue de la Vienne constate le surmenage de certains de ses confrères, qui menacent d’arrêter d’exercer à 55 ans. «Il faut prendre notre avenir en main et ces élections en sont l’occasion», lance-t-il.
Le Dr Eric Rouxel, ophtalmologue à Buxerolles (Vienne), est très sensible à la philosophie du syndicat. Membre de la section locale de la FMF, il s’est déconventionné en 2002 : «Je n’arrivais pas à m’en sortir fiancièrement en secteurI, je ne comprenais pas pourquoi. Les honoraires bloqués depuis 1995 ne me permettaient pas d’investir dans du nouveau matériel. Je fais maintenant payer 45euros la consultation. Ma salle d’attente ne désemplit pas et je réinjecte les dépassements dans mon cabinet et mon personnel. Mais je ne trouve pas normal que mes patients ne soient pas remboursés à hauteur du tarif opposable. Voilà pourquoi j’adhère au discours de la FMF de mettre en place un secteur unique à honoraires modulables.» Avant que les médecins ne quittent la salle, le Dr Régi rappelle aux médecins amusés : «Juste un détail pratique! N’oubliez pas de signer l’enveloppe dans laquelle vous aller glisser votre bulletin ou votre vote ne sera pas compatibilisé.»
(1) Dans le dernier sondage réalisé par l’institut Ifop pour « le Quotidien » paru dans notre édition du 15 mai, la FMF a recueilli 10 % des intentions de vote des généralistes et 19 % des spécialistes – un résultat en hausse de sept points par rapport au premier sondage du « Quotidien » réalisé en avril.
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