Décidément, le microbiote intestinal est un élément complexe qui n’a pas encore livré tous ses secrets, loin de là. Dans le cadre d’un vaste projet MetaHIT (METAgenomics of the Human Intestinal Tract), des chercheurs de l’Inra de Jouy-en-Josas sous la direction du Pr Dusko Ehrlich, viennent d’identifier une association forte entre une anomalie du microbiote intestinal et l’existence d’un diabète de type 2.
« Il s’agit d’une preuve de concept, explique le Pr Ehrlich. L’identification de cette dysbiose, par exemple à l’aide de bandelettes dans les fèces, permet de séparer les diabétiques des non diabétiques avec une précision de 80 %.Toutefois, je ne suis pas certain que diagnostiquer le diabète de type 2 par un examen du microbiote intestinal soit absolument nécessaire. En revanche, poursuit le chercheur, cela trouve un intérêt dans les anomalies où il faut un diagnostic invasif comme celui de la stéatose hépatique, par exemple. C’est un outil qui permettrait de détecter des anomalies à venir sur la base de perturbations de la communauté bactérienne intestinale ».
Pas de causalité, juste une association
L’étude a été menée chez 365 individus d’origine chinoise. Les chercheurs ont comparé le métagénome de diabétiques de type 2 à celui de non diabétiques de type 2. « C’est un travail assez complexe, explique Pierre Renault associé au projet, chacun d’entre nous a une flore différente. Celui-ci s’est fait dans le cadre de recherche de pathogénicité des dysbioses, c’est-à-dire le changement de composition de la flore intestinale qui fait que certaines bactéries disparaissent et d’autres, au contraire, apparaissent. Il ne faut donc surtout pas parler de causalité, mais d’association ». Les chercheurs ont ainsi identifié et validé environ 60 000 gènes marqueurs représentant des groupes de bactéries qui ont « bougé », associés au diabète de type 2.
Une translocation des bactéries intestinales vers le sang
Le diabète de type 2 serait donc caractérisé par un certain degré de dysbiose intestinale, avec un appauvrissement des bactéries productives de butyrate et à l’inverse une augmentation de pathogènes opportunistes. « Les entérocytes ont besoin de butyrate pour bien vivre. Au cours du diabète de type 2, on observe une diminution des espèces bactériennes qui produisent le butyrate, la barrière intestinale en est affaiblie, ce qui entraîne une translocation des bactéries intestinales vers le sang et produit une réaction inflammatoire de l’organisme » explique le Pr Ehrlich.
D’autres études sont en cours dans le cadre du projet MetaHIT et concernent les maladies inflammatoires, la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, mais aussi l’obésité.
Nature doi :10.1038/nature11450
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