LE FAMEUX COLLOQUE singulier entre le médecin et son patient s'est ouvert depuis longtemps à un tiers : le proche, en général le conjoint, l'enfant ou le parent du malade. Bien que le rôle de l'entourage familial du malade fasse l'objet de nombreuses recherches, celui du tiers lors de la consultation, en particulier en médecine générale, est encore largement méconnu. Pour la première fois, une étude est consacrée à la perception par les praticiens de la relation qu'ils entretiennent avec l'entourage présent lors de la consultation. Lancée par le service de proximologie des Laboratoires Novartis et intitulée Remede (RElations MEDecins-Entourage), elle a été menée auprès de 435 généralistes représentatifs et a permis d'analyser 2 175 cas de consultation accompagnée.
Un appui pour le généraliste.
Première constatation, la présence d'un tiers ne semble pas gêner le médecin : une consultation sur trois en cabinet médical et une consultation sur deux à domicile se font en présence d'un proche du patient. Dans 90 % des cas, le médecin accepte que l'entourage assiste à la consultation. « L'entourage est un appui sur lequel le généraliste peut compter », souligne le Dr Bruno Fantino, directeur de l'Association pour le développement de l'information médicalisée. Le médecin apprécie le concours de la famille pour le choix du maintien à domicile, l'aide au diagnostic par l'observation, l'observance des traitements, l'alerte en cas de besoin, l'évaluation de l'efficacité du traitement et le respect des règles hygiéno-diététiques. Cela est encore plus vrai pour les pathologies où les proches ont un rôle irremplaçable d'aidant : Alzheimer, Parkinson et dépression notamment.
Plus surprenant : le généraliste apprécie l'aide de la famille, par exemple pour décider de la stratégie thérapeutique dans certains cas : à 45 % pour la maladie d'Alzheimer, à 39 % pour la dépression, à 32 % pour l'asthme et à 31 % pour la maladie de Parkinson et le diabète de type 2.
Pourtant, la présence d'un tiers fait passer le temps moyen de la consultation de 14 à 22 minutes. « Ce temps n'est pas forcément du temps perdu », assure le Pr Jean-Pierre Wainsten, professeur de médecine générale à Paris-XII. Au cours de la consultation, 80 % des accompagnants posent des questions. Si 90 % des médecins estiment être capables de bien expliquer la maladie et son évolution à l'entourage, ils semblent plus démunis pour répondre aux questions d'ordre administratif, financier et social. Ils ont donc exprimé le souhait de disposer de davantage d'outils pratiques (listes des institutions, des services sociaux, des aides ménagères) et la moitié aimerait avoir accès à une FMC sur ce thème.
La relation entre les généralistes et les proches n'est pas pour autant exempte de difficultés. La première est d'annoncer une mauvaise nouvelle à l'entourage. Une autre est la difficulté de contourner la démission des proches. Selon le Dr Fantino, « lorsque l'entourage refuse de s'impliquer, le généraliste ne sait plus à qui s'adresser ».
Les recherches vont se concentrer sur la perception qu'ont les proches de la consultation. En espérant qu'elles ne révéleront pas trop de failles et d'incompréhensions. « Dans le colloque singulier, le médecin avait l'avantage sur le patient ; la présence d'un tiers rééquilibre en quelque sorte la relation » se félicite le Pr Jean-Pierre Wainsten.
Mieux vaut un enfant que le conjoint
Dans 90 % des cas, la personne qui accompagne le patient est un membre de sa famille. Une fois sur deux (54 %), c'est le conjoint, moins souvent (17 %) un enfant, et dans ce cas, généralement une fille (78 %). Or les médecins attribuent un rôle plus positif aux proches lorsqu'il s'agit de descendants (86 %) que lorsqu'il s'agit du conjoint (77 %). Les enfants des malades s'impliqueraient davantage, poseraient plus de questions et seraient davantage sollicités par le praticien.
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