LE MONDE des enfants nés sous X a été chamboulé par un arrêt de la Cour de cassation du 7 avril. La haute juridiction, appelée à se prononcer sur la place du père dans l’institution de l’accouchement sous X, a reconnu, ce jour-là, Philippe Peter, 43 ans, comme le père de Benjamin né sous X le 14 mai 2000. Cette première mondiale s’explique par le fait que Philippe Peter s’est rendu à la mairie de Lutterbach (Haut-Rhin) pour déclarer, avant même l’accouchement, que l’enfant à naître était le sien, précise la cour.
«Lors de l’accouchement, la mère peut demander que le secret de son identité soit préservé», stipule le code civil. Ce qui signifie qu’il n’existe aucune filiation légale pour un enfant né sous X. Toutefois, depuis 2002, l’enfant est autorisé à demander au Conseil national pour l’accès aux origines personnelles la levée du secret entourant sa naissance, si la mère ne s’y oppose pas. En quatre ans, sur 2 450 démarches en ce sens, 500 enfants ont retrouvé leur mère. Dorénavant, le père aussi détient la clé de la filiation, mais seulement s’il se rend à la mairie avant l’accouchement.
L’adoption annulée.
L’affaire Peter-Benjamin n’était pourtant pas des plus simples. Philippe Peter ne savait rien ni du lieu ni de la date de la naissance. Une enquête de sept mois lui apprend que Benjamin, porteur du VIH et victime de la dépression du nourrisson, a été confié à l’âge de 3 mois à un couple de médecins en vue d’une adoption. Après cinq années de combat la justice lui a donné raison.
«La reconnaissance prénatale avait établi la filiation paternelle de l’enfant avec effet le jour de sa naissance, de sorte que le conseil de famille des pupilles de l’Etat, informé de cette reconnaissance, ne pouvait plus (...) consentir valablement à l’adoption, ce qui relevait du seul pouvoir de son père naturel», affirme la chambre civile de la Cour de cassation. De son côté, la cour d’appel de Reims devrait annuler, dans les prochains mois, la procédure d’adoption afin d’établir la filiation entre Benjamin et Philippe Peter.
Au total, l’arrêt révolutionnaire du 7 avril 2006 entrouvre la porte de la filiation d’enfants nés sous X à certains pères, tandis que la mère y perd son anonymat. Qui, en effet, sera habilité à interdire au géniteur le droit de révéler le nom de la mère à sa fille ou à son fils, à moins que le législateur ne s’empare de ce nouveau vide juridique ?
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