« Les femmes enceintes n'ont pas à redouter la mort de leur enfant après un épisode fébrile », Anne-Marie Nybo Andersen et son équipe danoise sont affirmatifs. Après des doutes résultant d'études animales, voire d'enquêtes chez l'humain, ces épidémiologistes de Copenhague ont tenté d'établir des conclusions plus formelles à partir d'une vaste étude de population.
Ils ont obtenu des informations auprès de 24 040 femmes enrôlées au cours de la première moitié de leur grossesse. Il leur a été demandé de relever les épisodes fébriles pendant les 16 premières semaines de la gestation. Chaque fois, elles précisaient l'élévation thermique maximale, la durée de l'épisode et le stade de la grossesse.
4,8 %de fausses-couches ou de mort-nés
Premier constat : la fièvre est un symptôme courant pendant la grossesse, puisque 18,5 % des femmes l'ont rapporté, au moins une fois. Ensuite, plus important, 1 145 grossesses, soit 4,8 %, se sont achevées sur une fausse-couche ou un enfant mort-né (taux comparable à la moyenne nationale). Selon les auteurs, il n'existe aucune relation entre le risque vital pour le foetus et la fièvre, avant et après ajustement en fonction des divers facteurs de risque de mort foetale (risque relatif 0,95). La durée ou le niveau de la fièvre, le nombre d'épisodes n'influent pas sur cette absence de relation. Une précision importante : même si l'étude a été menée sur les 16 premières semaines, l'absence d'influence de la fièvre ne peut être jugée qu'après la sixième semaine, lorsque la grossesse devient cliniquement apparente. C'est d'ailleurs l'un des points d'achoppement de l'étude, que relèvent deux éditorialistes de San Diego (Californie). Nombre de femmes, selon eux, n'ont pu être prises en compte dans l'étude, car elles ont avorté avant même d'être enrôlées. Dès lors, toujours selon les Américains, la relation entre fièvre et avortement précoce n'a pu être étudiée. L'obstacle, reconnaissent-ils, est d'ailleurs difficile à éviter. Ils relèvent un autre biais dans l'étude danoise. Elle n'a pu dire avec certitude si le risque est majoré chez les femmes ayant eu plus de 38,9 °C sur une période prolongée, seuil théoriquement tératogène chez l'humain, en raison de leur faible nombre.
L'hyperthermie est suspecte de multiples troubles au cours de la grossesse. Interférant avec les protéines de choc thermique, elle induit la mort cellulaire ou un retard des mitoses, responsable d'atteintes vasculaires et d'infarctus placentaire. De quoi entraîner la mort foetale ou de sévère malformations. Une contractilité utérine anormale est également suspectée, de même que des anomalies du tube neural ou des anomalies cardio-vasculaires.
« Lancet », vol. 360, 16 novembre 2002, pp. 1552-1556 et 1526 (éditorial).
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