Sur les apports nutritionnels conseillés à la future maman, l'intervention du professeur de nutrition Jean-Louis Bresson, qui dirige le centre d'investigation clinique de l'hôpital Necker-Enfants - Malades, est claire et simple.
« Le seul message essentiel à faire passer auprès de toutes ces femmes enceintes, s'amuse à dire le Pr Jean-Louis Bresson, est de manger à sa faim. » Il s'élève contre les recommandations diverses et variées à propos de l'état précaire qui caractériserait la femme enceinte. « Tout indique que les mécanismes d'adaptation permettent à des femmes en bonne santé et ayant une alimentation variée, de mener une grossesse normale à son terme sans autre ressource que celle que procure l'augmentation spontanée de leur consommation alimentaire », affirme-t-il.
Donc, concernant les suppléments, aucune justification ne peut être avancée : « Non, il ne faut pas donner de suppléments à la femme enceinte sauf cas extrême », confirme encore le spécialiste qui fait toutefois une exception pour les suppléments comme le fer, le calcium et la vitamine D, à proposer à des adolescentes enceintes ou à des femmes dans certains milieux à risque.
Le Pr Bresson tient compte de l'efficacité avec laquelle le placenta tire partie des réserves naturelles et du rôle tampon qu'elles peuvent jouer entre les besoins du foetus et les fluctuations des ressources alimentaires.
Il souligne l'incroyable capacité d'adaptation de l'organisme maternel. En effet, une part importante des besoins, durant les neuf mois et au moment de la lactation, serait couverte par « un ajustement anticipé ». La femme prépare ses réserves de graisses, par exemple, avant que les besoins du foetus ne se manifestent. Ces adaptations sont très variables d'une femme à l'autre.
Le Pr Bresson rapporte une étude faite sur des populations hollandaises au moment des restrictions alimentaires les plus dures de l'hiver 1944/45. On a remarqué un poids de naissance plus faible seulement chez les enfants dont le troisième trimestre de gestation dans le ventre de leur mère a coïncidé avec la famine. Les mères avaient déjà épuisé leurs réserves. Les bébés conçus pendant la période de famine, mais dont les mères enceintes de quelques mois ont retrouvé ensuite une alimentation normale, présentaient des poids normaux. On peut en conclure qu'une restriction énergétique sévère aura des conséquences sur la croissance foetale si cela se passe au troisième trimestre.
Le taux de calcium s'autorégule. La mère, à la huitième semaine, accroît naturellement l'absorption de calcium que le foetus dépose dans son organisme. On constate ensuite, après une chute du taux de calcium au moment de l'accouchement, une nouvelle élévation du taux pendant toute la période d'allaitement, « comme si la femme contracte un emprunt de calcium », explique le Pr Besson.
Une femme en bonne santé, et qui bénéficie d'une bonne alimentation, peut et doit poursuivre une grossesse sans complément d'aucune sorte. Mais les populations à risque sont à surveiller.
Intervention à retrouver dans « la Lettre scientifique » de l'Institut français pour la nutrition n° 80, Prs Bresson et Rey, 71, avenue Victor-Hugo, 75116 Paris.
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