Chaude semaine pour les rétrovirologues : après l'annonce de la découverte d'un nouveau rétrovirus humain, le virus HTLV3, par une équipe de l'Institut Pasteur ( « le Quotidien » du 16 mai), c'est aujourd'hui au tour d'une équipe américaine de publier des travaux qui ont conduit à l'identification de plusieurs rétrovirus HTLV qui n'avaient jamais été décrits auparavant.
Les chercheurs de l'université Johns Hopkins (Baltimore, Maryland) ont mis en évidence plusieurs nouveaux virus apparentés au HTLV1 et un virus partageant des similarités avec le virus simien STLV3, comme celui découvert par l'équipe d'Antoine Gessain. Ils ont également découvert un autre virus de la famille des TLV, totalement différents de tous ceux déjà identifié chez l'homme et chez les primates non humains. Ce nouveau virus a été baptisé HTLV4.
Chasse, abattage et consommation de viande de brousse.
Nathan Wolfe et coll. ont identifié les nouveaux HTLV en utilisant une approche similaire à celle de l'équipe de l'Institut Pasteur : ils ont analysé des échantillons sanguins prélevés à des volontaires camerounais, vivants dans des villages proches des habitats naturels de primates non humains. La principale différence entre l'étude française et l'étude américaine réside dans le fait que les Américains ont spécifiquement recruté les individus qui ont eu des contacts fréquents avec les singes, les chimpanzés et les gorilles via la chasse, l'abattage et la consommation de viande de brousse. L'émergence des virus humains étant certainement liée à la transmission à l'homme de virus simiens, Wolfe et coll. ont choisi ce mode de recrutement de manière à augmenter leur chance de découvrir de nouveaux virus dans le sang des individus testés.
L'analyse sérologique du plasma des 930 volontaires retenus pour l'étude a révélé qu'environ 10 % d'entre eux étaient infectés par un virus HTLV. Chez 13 individus, les virus détectés appartenaient à la famille HTLV, mais ils ne ressemblaient à aucun des HTLV déjà caractérisés. Une analyse de l'ADN viral présent dans les cellules mononucléaires du sang de ces 13 individus a permis à Wolfe et coll. de préciser la nature de ces virus inédits. Dans onze cas, il s'agissait de sous-types encore inconnus de la famille HTLV1. Dans les deux autres cas, les résultats se sont révélés encore plus intéressants : les données de séquence obtenues par Wolfe et coll. et leur confrontation aux banques de données nucléotidiques indiquent en effet qu'il s'agit de deux virus HTLV non 1 et non 2.
Le premier de ces deux nouveaux rétrovirus possède, tout comme le virus découvert à l'Institut Pasteur, une séquence génomique similaire à celle du virus simien STLV3. Les chercheurs l'ont donc baptisé HTLV3. L'équipe française et l'équipe américaine doivent maintenant confronter leur données afin de savoir si elles ont découvert la même souche souche virale HTLV3 ou si leurs expériences respectives les ont conduits à identifier deux rétrovirus distincts mais apparentés.
Le début d'une nouvelle histoire.
Le deuxième rétrovirus non HTLV1, non HTLV2 identifié par Wolfe et coll. ne ressemble à aucun des virus SLVT connus. C'est pourquoi les chercheurs américains ont proposé qu'il soit le premier virus d'une nouvelle famille de LVT, la famille HLVT4.
Reste maintenant à définir les propriétés de ces nouveaux virus. Sont-ils pathogènes ? Quels sont leurs modes de transmission ? Se sont-ils déjà répandus dans la population humaine ? Les découvertes simultanées des chercheurs de l'Institut Pasteur et de l'université Johns Hopkins ne constituent que le début d'une nouvelle histoire.
Wolfe et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.
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