LES ETUDIANTS EN MEDECINE redoutent le très sélectif concours de première année et les difficiles épreuves classantes nationales (ECN). A Besançon, ils vont maintenant craindre la 5e année.
Pas moins de 31 étudiants bisontins sur les 95 de Dcem3 ont été recalés par la commission pédagogique de la faculté. Le taux d'échec de cette promotion (environ 33 %) est très anormalement élevé, la moyenne nationale étant inférieure à 10 %, selon l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). « Je ne comprends pas ce qui se passe, confie Hervé (1). Je redouble parce que j'ai loupé deux modules à 9/20 de moyenne. L'an dernier, je serais passé. »
Les raisons du désastre.
Les étudiants de Besançon sont-ils devenus subitement moins doués que les autres ou ont-ils été soumis à un jury plus sévère ? « Ni l'un, ni l'autre », affirme le doyen de la faculté, le Pr Hugues Bittard. Cette hécatombe résulterait de la mise en place des épreuves classantes nationales (ECN), il y a deux ans. Le nouvel internat pour tous a provoqué une petite révolution en permettant de classer les 41 facultés de France en fonction de leur résultat au concours. Lanterne rouge de la première édition en 2004, Besançon a reformé son programme pédagogique et s'est hissée au 26e rang cette année. « Nous avons mis en place des modules disciplinaires et multidisciplinaires avec davantage de cas cliniques et le niveau a été élevé par le jury, reconnaît Hugues Bittard. Cette demande a été formulée par les étudiants pour mieux les préparer aux ECN ».
Depuis plusieurs années, plane la menace d'un rattachement de la faculté de Besançon à celle de Dijon, proche de 80 km. « Si on ne maintient pas un bon niveau de formation, la faculté de Besançon ne survivra pas », explique le Pr Bittard. Le grand nombre de redoublements serait donc la rançon de la gloire.
Le président de la Conférence des doyens, le Pr Bernard Charpentier, n'a pas souhaité commenté le fond du dossier dont il n'avait pas connaissance. Mais il s'est déclaré surpris par le taux de recalés : « Il est prouvé que le redoublement ne permet pas d'obtenir de meilleurs résultats au concours de l'internat. Nous aborderons le sujet lors de la prochaine réunion des doyens mardi (aujourd'hui). »
Quant aux carabins concernés, ils ont l'impression d'être sacrifiés. « Nous avons cru pendant deux semaines que nous serions repêchés mais le rattrapage s'est effectué à la tête du client. Deux étudiants ont été remontés à 10/20 alors qu'ils avaient 9,25/20 et d'autres, non, alors qu'ils étaient dans le même cas », dénonce Hervé. Julie crie également à l'injustice puisque 4 membres du jury sur 9 n'étaient pas présents lors de la seconde commission pédagogique : « Mon professeur n'était pas là et mon cas n'a pu être défendu. Nous essayons depuis une semaine d'obtenir un rendez-vous avec le doyen et nos responsables pédagogiques. Sans succès ». Marc est résigné : « Je vais me tourner les pouces pendant un an pour repasser deux épreuves. Tout ça pour l'apprentissage de l'exercice médical, une matière qui ne sera plus au programme cette année. »
Jury souverain.
Le Pr Bittard déplore une situation qui ne répond pas à la « volonté délibérée » de la faculté. « J'aurais souhaité faire passer ces étudiants en 6e année en modifiant les conditions d'accession en année supérieure mais je me suis heurté à des obstacles législatifs, se défend-il. Des professeurs n'ont pas souhaité relever leurs notes. Le jury est souverain. » Un interne de l'hôpital de Besançon pense que les 31 recalés serviront d'exemples pour les prochaines promotions. « Ils font les frais de la nouvelle politique de la faculté qui souhaite rayonner davantage que ses proches voisines de Dijon, Nancy ou Strasbourg. La sanction est raide. »
Ce dossier est en tout cas « une épine dans le pied » du doyen . « Notre réforme était ambitieuse, mais nous n'avons pas mesuré ses effets négatifs », confie-t-il. Les recalés auront un an pour le faire.
(1) Les prénoms des étudiants ont été changés.
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