Le diabète est longtemps resté le parent pauvre de notre spécialité, comme de la médecine en général. Les recherches ne semblaient avancer qu’à pas de fourmi. Nous sommes très longtemps restés assez désarmés face à ce mal peu diagnostiqué et souvent jugé hors de portée de toute thérapeutique possible, sans parler de la fréquente culpabilisation des patients eux-mêmes.
Et, alors qu'une épidémie mondiale de diabète s'est installée (bientôt un demi-milliard d’individus sur terre), soudain les découvertes se sont accélérées : sur le plan de la physiopathologie (hormonale, métabolique, génétique, épigénétique, microbiote), mais aussi avec la découverte de nouvelles insulines et d'antidiabétiques, oraux et injectables… Avec en prime la démonstration de leurs effets cardiovasculaires préventifs.
Les technologies ont suivi, avec l'explosion des possibilités des outils de suivi et de traitement (capteurs et pompes à insuline), de conseil à distance et de télémédecine. En parallèle, la chirurgie bariatrique, les traitements médicaux et chirurgicaux de la rétinopathie, la prévention de la néphropathie (en recul dans le diabète de type 1 [DT1]) ont continué de se développer.
L'investissement des tutelles dans le diabète, avec le développement de l’éducation thérapeutique et l'organisation des soins, devra suivre ; cela reste complexe, en raison du nombre d'acteurs impliqués.
Depuis peu, notre spécialité se pose la question de la nécessité d’une médecine de précision. Certes, la génétique a identifié les diabètes monogéniques (MODY) et néonataux depuis 20 ans – la contribution de la recherche française a été déterminante. Mais c’est au tour du diabète de l’adulte, énorme masse étiquetée « diabète de type 2 » représentant environ 90 % de tous les diabètes, que le besoin se fait sentir de démembrer, alors qu'actuellement on applique à tous le même algorithme de prise en charge médicamenteuse.
En réalité, nous savons maintenant que la moitié des DT1 se révèlent après l’âge de 30 ans et que, pour environ 1/5e des DT2, l’insulinopénie domine le tableau. Par ailleurs certaines formes sont à moindre risque de complications, alors que d’autres présentent un haut risque rénal ou rétinien.
Un démembrement du DT2 en cinq catégories a été proposé. Cela sera-t-il valable pour toutes les populations ? On l’ignore. Mais, d’ores et déjà, ces avancées renforcent notre intérêt pour affiner nos diagnostics… Donc utiliser le bon médicament pour le bon patient, face au coût grandissant de cette maladie, afin aussi que la prise en charge par notre système de santé puisse être maintenue pour tous.
Cela plaide pour une meilleure définition du rôle du diabétologue qui évitera un prêt-à-porter diagnostique comme thérapeutique, à tous égards préjudiciable.
Professeur émérite, Grenoble
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