Née de deux curiosités réciproques, la rencontre entre l'opéra de Nantes et l'Association Sciences et arts, qui regroupent des médecins mélomanes, est plutôt insolite. D'un côté, il y a le directeur général de l'opéra de Nantes, Philippe Godefroid, et de l'autre, Hervé Richet, professeur de microbiologie et d'hygiène hospitalière à la faculté de médecine de la même ville, qui préside l'association.
« L'Association Sciences et arts a été créée de façon conjointe avec l'opéra, raconte Hervé Richet. Lors d'un colloque qui devait être exclusivement médical, puisqu'il s'agissait d'infections nosocomiales, nous avons accueilli Philippe Godefroid, avec qui nous avons eu un échange passionnant. Nous nous sommes alors aperçus qu'il y avait un parallélisme dans nos façons de travailler. » Après deux manifestations consacrées l'une à l'évocation des épidémies autour de « la Traviata » (Verdi) en 1997, l'autre à celle du désir et de la rencontre amoureuse autour des « Noces de Figaro » (Mozart) en 1999, les deux compères organisent, samedi 27 octobre, un troisième colloque sur les expressions de la douleur, à l'occasion des représentations de Carmen. « Il n'y a pas de lien direct entre la douleur et l'opéra de Carmen, précise Hervé Richet. Mais Philippe Godefroid souhaitait parler de ce thème. Car finalement, dans l'opéra, tout le monde souffre. »
La volonté des organisateurs du colloque est d'entraîner le public à débattre sur différents points de vue : ceux du médecin, de l'artiste, du sociologue et même du politique. Y participeront des personnalités aussi diverses que Claude Evin, ancien ministre de la Santé, Jacques Demotes, neurobiologiste, David Le Breton, anthropologue, Martine Lani-Bayle, psychologue et écrivain, Philippe Forest, écrivain, Naomi Mutoh, danseuse chorégraphe, Jean-Joseph Julaud, écrivain, Vincent Amiel et N.T. Binh, de la revue de cinéma « Positif », Claire Gérin-Pierre, conservateur de musée, Bernard Pessac, directeur de l'équipe du CNRS « Développement et immunité du système nerveux central » et Aline Schulman, traductrice et romancière.
« La quasi-totalité des héros tragiques, à l'opéra, comme ailleurs, est destinée à périr - mais d'abord à nous en informer - et à souffrir devant nous mille morts, l'extension des scènes d'agonie, parfois jusqu'à l'absurde, en étant la meilleure preuve, explique Philippe Godefroid. Souffrir sur scène, c'est vivre. Et par "souffrir" , que l'on n'entende pas seulement "être malheureux" . Il s'agit bien, et plus souvent qu'on ne le croit ou qu'on ne veut le montrer, d'une détresse physique, devant laquelle les médecins officiels restent obligatoirement muets. Ce rapport ambigu au corps torturé a quelque chose, pour nous public, de fascinant et repoussant à la fois. » La question mérite débat.
Colloque « Parle, ô ma douleur », le samedi 27 octobre, de 9 à 18 heures, au théâtre Graslin, à Nantes. Renseignements au 02.40.41.90.63 ou au 02.40.41.90.60.
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