Une fois la boîte commencée, le gourmand de chocolat n'a de cesse qu'elle soit finie. Plus grave, le toxicomane, à la vue d'une seringue ou d'un élément évoquant sa drogue, ressent le manque. Tous deux, à des degrés différents, sont victimes, entre autres, d'une décharge cérébrale de dopamine. Une question restait pourtant en suspens jusqu'à ce jour : la libération de dopamine précède-t-elle ou suit-elle la récompense (chocolat ou drogue) ?
Paul Phillips et son équipe (Chapel Hill, Caroline du Nord) viennent d'y répondre dans la revue « Nature ». Leurs travaux menés chez des rats, dressés à recevoir de la cocaïne après avoir appuyé sur un levier, suggère que la dopamine est libérée dès qu'un signal annonciateur de l'objet convoité survient. L'entrée dans la cage de l'expérimentation déclenche la libération de dopamine (avec un petit pic). Son taux cérébral augmente à mesure que le rongeur s'approche du levier, pour connaître un pic quelques secondes après l'administration de cocaïne, associée à un signal sonore. Les chercheurs relèvent que, chez le rat dressé, ce simple son suffit à provoquer la libération de dopamine. Ils notent aussi que la stimulation électrique des structures cérébrales dopaminergiques crée le comportement de recherche de la récompense. L'animal s'approche du levier qu'il enfonce.
Les auteurs en déduisent que les décharges de dopamine sont mises en jeu à la fois dans le déclenchement et la poursuite de la recherche de récompense. Des signaux de l'environnement amorcent ce comportement. Les scientifiques considèrent qu'une nouvelle libération de dopamine ne se produit que lorsque le taux chute en dessous d'un certain seuil. Mais un événement extérieur ne déclenchera de recherche de récompense que si cette seconde libération est possible.
« C'est à la fois la poule et l'oeuf », explique un éditorialiste. La dopamine agit comme la récompense d'un comportement qui précède sa propre libération. Puis elle déclenche la recherche de cette récompense, dès lors qu'elle est libérée.
C'est ainsi que la durée de vie des boîtes de chocolat s'abrège et, surtout, que le toxicomane est engagé dans un cercle vicieux contrôlé par la dopamine.
« Nature », vol. 422, 10 avril 2003, pp. 573-574 (éditorial) et 614-618.
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