A regarder le tableau des regroupements, dissidences, rapprochements et désunions des candidatures pour les élections législatives, on a le sentiment que se prépare une réédition du premier tour de la présidentielle.
C'est inquiétant. Bien que les deux partis dominants, le RPR et le PS, tentent de passer en force sur tous ceux qui veulent garder leur identité spécifique, ils n'obtiennent que des résultats mitigés.
A droite, François Bayrou tient bon. Son combat est honorable et justifié : il s'efforce de maintenir l'UDF en vie, au moment où le RPR est relativement discrédité par les affaires et où Jacques Chirac lui-même, bien qu'il ait été en quelque sorte plébiscité, sort à peine d'une traversée du désert qui a duré cinq ans.
UDF : 130 candidats
Intègre et doté d'un programme sérieux, M. Bayrou méritait mieux que les 6,9 % des suffrages qu'il a obtenus. Il souffre aujourd'hui de ce qu'il a contribué à affaiblir le score de Jacques Chirac au premier tour, même si le président est arrivé en tête. Et il est abandonné par bon nombre des siens qui ont rallié l'UMP (Union pour la majorité présidentielle), alors que l'ex-candidat à la présidence, Alain Madelin, décide, lui, de fondre Démocratie libérale dans l'UMP.
Il n'empêche que M. Bayrou et l'UDF présenteront environ 130 candidats. Ils assurent qu'ils ne feront pas le jeu du Front national, que les circonscriptions dans lesquelles leurs candidats seront présents ne comportent pas de risque pour la droite classique, mais qu'ils peuvent prétendre à un nombre assez élevé de sièges à l'Assemblée pour former un groupe parlementaire distinct de l'UMP. Ce qui, bien sûr, ne les empêchera pas de voter comme l'UMP.
M. Bayrou agace M. Juppé et M. Monod, les deux grands prêtres de la religion chiraquienne. Mais en toute justice, il manque au camp chiraquien le bilan et les suffrages qui assureraient son hégémonie.
Par ailleurs, le CNPT (Chasse, nature, pêche et tradition) de Jean Saint-Josse présente environ 400 candidats. Il n'est pas considéré comme dangereux par l'UMP, d'une part parce que, s'il obtient des sièges, il votera sans doute avec l'UMP et d'autre part parce que son implantation locale est beaucoup plus dispersée que celle du Front national, lequel occupe nombre de bastions dans le nord-est et l'est et sera présent au second tour dans de nombreuses circonscriptions. Ce qui lui permettra de jouer un rôle d'arbitre entre la droite classique et la gauche. Tel n'est pas le cas du CNPT, qui n'a rien à voir avec l'extrême droite et ne risque pas de rejoindre son camp.
L'UMP n'a pas poussé ses pions trop loin et semble résignée à laisser un certain nombre de circonscriptions à l'UDF. Cependant, comme l'a réaffirmé Edouard Balladur, la bataille est loin d'être gagnée pour elle et elle est tenue de remplir deux objectifs : faire, dans les trois semaines qui suivent, la meilleure campagne possible et et obtenir du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin des actes convaincants.
Elle compte aussi sur les divisions de la gauche. François Hollande s'est surtout employé à reconstituer l'ex-majorité plurielle, parce qu'il n'a pas d'autre choix. Mais cette stratégie n'est guère enthousiasmante pour l'électorat de gauche, qui a pu assister, lors de la campagne pour l'élection présidentielle, aux pénibles déchirements de l'ancienne coalition de gouvernement. Les Verts et les communistes ont pratiquement fait tout ce qu'il fallait pour donner l'impression qu'ils étaient opposés au programme qu'ils avaient pourtant appliqué au sein du gouvernement.
Quant au Pôle républicain qui, lui aussi présente des candidats dans quatre cinquièmes des circonscriptions, il a rompu avec la gauche. Laquelle, par ailleurs, sera à peine moins vulnérable que la droite aux triangulaires provoquées par la présence du FN au second tour et doit compter encore sur les 440 candidats que la Ligue communiste révolutionnaire (la LCR d'Olivier Besancenot) va présenter. M. Besancenot, qui ne fait pas mystère de son désir de mettre la gauche en échec, déplore de n'avoir pu trouver un accord avec Lutte ouvrière (Arlette Laguiller). C'est dire que le vote trotskiste va se disperser, à tel point qu'il ne franchira sans doute presque jamais ou jamais le premier tour.
Mais on ne voit pas pourquoi l'électorat ne sera pas tenté une nouvelle fois par un vote de protestation. On ne voit pas pourquoi les extrêmes ne vont pas porter un préjudice aux partis dominants et refaire, cette fois encore, le jeu de l'extrême droite.
Le « front du refus »
Certes, en 1997, tous étaient représentés. Cette année-là toutefois, la gauche s'était dressée contre un Premier ministre dépeint comme un épouvantail. L'électorat s'est donc contenté de protester contre le pouvoir en place. En 2002, le « front du refus » rejette et le camp du président et le camp de l'ex-Premier ministre.
Quand on fait le compte des handicaps, on en trouve en définitive plus à gauche qu'à droite, ce qui explique la confiance discrète avec laquelle l'UMP aborde les législatives ; elle se contente d'insister sur les incertitudes du scrutin, moins parce qu'elle craint la défaite que parce qu'elle redoute la démobilisation de son électorat.
Il demeure que la compétition est ouverte. C'est seulement lorsque la liste des candidatures de chaque parti sera établie que les les instituts de sondage pourront faire des prévisions. Ce ne sera pas avant la semaine prochaine.
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