REFERENCE
Neuropathie diabétique
La neuropathie diabétique représente la cause spécifique la plus fréquente de diarrhée du diabétique insulinodépendant, alors qu'elle est exceptionnelle dans le diabète non insulinodépendant. La diarrhée est liée à des anomalies motrices et à des troubles de l'absorption hydroélectrolytique, tous deux secondaires à l'atteinte du système nerveux intrinsèque et extrinsèque du tube digestif.
Les caractéristiques cliniques sont celles d'une diarrhée motrice avec émission de selles fréquentes, mais peu abondantes, impérieuses, postprandiales. L'incontinence fécale survient dans 20 % des cas. Le diagnostic repose sur le contexte, les autres signes de neuropathie végétative et les signes de neuropathie périphérique. Les explorations morphologiques sont négatives, et il n'existe aucun signe de malabsorption. Le traitement symptomatique de la diarrhée par un ralentisseur du transit (lopéramide ou codéine) suffit habituellement. Les mucilages peuvent être utiles pour augmenter la consistance des selles et réduire l'incontinence fécale. Dans certains cas de diarrhée rebelle à ces traitements et invalidante, la clonidine et l'octréotide peuvent être tentés.
Colonisation bactérienne du grêle
La colonisation bactérienne chronique du grêle (CBCG) est induite par les troubles moteurs intestinaux et est également favorisée par l'achlorhydrie qui s'observe chez près de 20 % des diabétiques. Elle se manifeste par une diarrhée avec syndrome de malabsorption prédominant sur les graisses et les vitamines liposolubles. Le test respiratoire permet d'identifier 40 % des CBCG chez les diabétiques, mais son rôle pathogénique ne sera prouvé que par la régression des symptômes sous traitement antibiotique d'épreuve.
Pancréatite chronique
Une pancréatite chronique peut entraîner une double insuffisance endocrine et exocrine lorsqu'elle a détruit la quasi-totalité du parenchyme pancréatique. Dans ce cas, le diabète s'accompagne d'une diarrhée avec malabsorption, affectant quasi-exclusivement les graisses et les vitamines liposolubles. Le diagnostic clinique est presque toujours évident. Lorsqu'un fécalogramme est effectué, l'importance de la stéatorrhée, et surtout de la concentration des graisses fécales, apporte des éléments d'orientation supplémentaires. Il est donc exceptionnel qu'un recours à un test sécrétoire pancréatique soit nécessaire au diagnostic. Les extraits pancréatiques corrigent plus ou moins complètement la diarrhée et la stéatorrhée. Le rôle du diabète comme facteur de risque de l'adénocarcinome du pancréas reste controversé. Il n'en demeure pas moins vrai qu'un diabète peut compliquer, voire révéler, un adénome carcinome pancréatique. Il faut donc évoquer cette possibilité, que le diabète soit connu ou révélé par la diarrhée.
Médicaments
Certains médicaments du diabète peuvent induire une diarrhée. Le plus souvent, l'interrogatoire et une épreuve d'interruption évitent des explorations inutiles. Dans les cas difficiles, l'ionogramme fécal avec mise en évidence d'un trou osmotique anormalement élevé orientera le diagnostic.
Maladie coeliaque
Plus de 5 % des diabétiques insulinodépendants ont une maladie coeliaque (MC), ce qui représente une prévalence très nettement supérieure à celle observée dans la population générale. Le diagnostic doit être évoqué chez tout diabétique insulinodépendant ayant des signes cliniques et/ou biologiques de malabsorption, voire recherché systématiquement (anti-endomysium de type IgA et antitransglutaminase). Néanmoins, seule la présence d'une atrophie villositaire totale ou subtotale permet un diagnostic certain et autorise la mise en route d'un régime sans gluten. Enfin, d'autres associations peuvent exister : déficits immunitaires acquis et congénitaux, certaines tumeurs neuro-endocrines, colite microscopique.
Interrogatoire et examen clinique
L'interrogatoire et l'examen clinique vont permettre de préciser les caractères de la diarrhée, fréquence, volume des selles, présence d'éléments anormaux, horaire d'émission, degré d'urgence des besoins et incontinence, facteurs calmants et aggravants. Les signes fonctionnels et généraux associés, les antécédents personnels et familiaux, les habitudes alimentaires et les prises médicamenteuses sont systématiquement analysés. Un examen clinique exhaustif complète cette approche clinique et la recherche de signes extradigestifs est importante. En dehors des données concernant l'équilibre du diabète, sont requis : une NFS avec VS, une calcémie, une électrophorèse des protides, un TP, un dosage de TSH et, en cas de facteurs de risque, une sérologie VIH. L'examen parasitologique des selles est effectué systématiquement, voire répété. Une coproculture n'est nécessaire que lorsqu'un syndrome immunodéficitaire est plausible. Dans le contexte d'un diabète, la recherche d'anticorps anti-endomysium et antiglutaminase et un test au carmin seront prescrits, ainsi que la recherche d'un CBCG par test respiratoire au glucose.
A l'issue de cette évaluation, si aucune étiologie ne s'impose, une exploration endoscopique (notamment basse) du tube digestif s'impose. Parfois, des examens plus sophistiqués peuvent être nécessaires : dosages hormonaux (sérotonine, 5HIAA, thyrocalcitonine), voire quantification du débit fécal et examen coprologique.
D'après la communication de R. Jian (service d'hépato-gastroentérologie, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris) lors des 43es Journées de diabétologie de l'Hôtel-Dieu.
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