1) Stratégie diagnostique
1.1) Orientation étiologique. Il est clair (comme l'ont montré les chapitres précédents) que l'interrogatoire est un des temps importants de la prise en charge d'une diarrhée aiguë de l'adulte (séjour en pays tropical ? Arguments pour une toxi-infection alimentaire ? Prises médicamenteuses ?…).
1.2) Recherche de signes de gravité.
1.2.1) L'examen clinique cherche d'abord des signes de gravité :
– déshydratation ?
– complication abdominale ?
1.2.2) Il faut effectivement craindre et éliminer (en s'aidant au besoin d'une radiographie de l'abdomen sans préparation [ASP], voire d'un scanner abdominal) une dilatation colique (mégacôlon toxique) et sa complication possible, la péritonite par perforation.
1.2.3) Le mégacôlon toxique :
1.2.3.1) est susceptible de compliquer en particulier les colites à germes invasifs ou dues au Clostridium difficile;
1.2.3.2) son apparition peut être favorisée par l'usage de ralentisseurs du transit (qui est donc contre-indiqué dans ces situations).
1.3) Quand faut-il demander une coproculture ?
1.3.1) L'examen bactériologique des selles a habituellement peu d'intérêt dans les diarrhées aiguës car :
1.3.1.1) il est fréquemment négatif,
1.3.1.2) une antibiothérapie est rarement utile.
1.3.2) Un certain nombre de règles concernant la coproculture doivent être rappelées :
1.3.2.1) il faut d'abord essayer d'identifier une cause non infectieuse de la diarrhée (prise médicamenteuse, hyperthyroïdie…) qui rend alors la coproculture inutile ;
1.3.2.2) une diarrhée aiguë, non sanglante, évoluant depuis moins de trois jours ne justifie pas la réalisation de cet examen (ni d'autres explorations) ;
1.3.2.3) les indications de la coproculture sont résumées en bas de l'encadré ci-contre.
1.4) Une recto-sigmoïdoscopie avec biopsies peut être utile en cas de :
– suspicion de colite à Clostridium difficile, car elle peut montrer un aspect typique de cette affection (colite pseudo-membraneuse) et elle permet la réalisation de biopsies ;
– en cas de diarrhée sanglante.
1.5) Les principaux examens utiles en cas de diarrhée infectieuse sont indiqués dans l'encadré jaune.
2) Comment traiter ?
2.1) Réhydratation. La réhydratation est essentielle.
2.1.1) Elle doit comporter du sodium, du potassium et du glucose (qui favorise l'absorption des électrolytes).
2.1.3) Elle associe un apport liquidien (eau ou jus de fruits) et solide comportant glucose, sel et potassium (riz, fruits secs, gâteaux salés…). En cas de vomissements, on aura recours à de petits repas répétés.
2.1.4) La réhydratation s'impose précocement, en particulier chez les personnes âgées ou débilitées.
2.1.5) En cas de déshydratation aiguë ou de vomissements répétés, la voie veineuse devient nécessaire.
2.2) Antibiothérapie :
2.2.1) L'antibiothérapie est trop souvent utilisée. Les principales indications sont résumées dans l'encadré 1.
2.2.2) Les antibiotiques actuellement recommandés sont les suivants :
2.2.2.1) quinolones, 1 cp matin et soir (en sachant qu'il existe une résistance croissante des entérobactéries aux quinolones) ;
2.2.2.2) azithromycine, 500 mg le 1er jour, puis 250 mg/j ;
2.2.2.3) céphalosporine de 3e génération (généralement ceftriaxone 1 g/j en I.V.).
2.2.3) La durée recommandée de prescription est d'une semaine (en sachant que des schémas monodoses ont été validés dans la turista [diarrhée du voyageur]).
3) Traitement symptomatique
3.1) La réhydratation, primordiale, a été envisagée ci-dessus.
3.2) Les ralentisseurs du transit :
3.2.1) sont illogiques en cas de diarrhée infectieuse,
3.2.2) peuvent favoriser une colectasie.
On préférera donc si besoin l'usage bref d'un antisécrétoire.
Réponse
L'assertion 2.2.3) est inexacte. En effet, la durée de prescription recommandée en cas d'antibiothérapie dans une diarrhée aiguë d'origine infectieuse n'est pas d'une semaine, mais de 3 à 5 jours.
(1) Bouchaud O. Diarrhées aiguës infectieuses Rev Prat, 2008 ; 58 : 1179-1186.
(2) Beaugerie L, Yazdanpanah Y. Diarrhées aiguës et syndromes dysentériques. In Traité de gastro-entérologie. Rambaud JC Ed. Médecine Sciences Flammarion Paris 2000 ; 121-36.
Suspicion de diarrhée infectieuse : principaux examens
EXAMENS SANGUINS
NFS, CRP*
Tableau sévère.
Créatinine, urée, ionogramme Déshydratation, tableau sévère, sujet fragile, comorbidités.
Hémoculture
Fièvre, hypothermie.
EXAMENS DE SELLES
Coproculture
– pas toujours nécessaire,
– avant une antibiothérapie (voir encadré).
Recherche des toxines de CD**
Diarrhée au cours ou au décours (2 mois) d'une antibiothérapie (AB), en particulier si elle persiste à l'arrêt de l'AB ou si le terrain est débilité.
Examen parasitologique
À faire dès l'émission des selles, les protozoaires (dont les amibes) sont fragiles .
EXAMENS RADIOLOGIQUES
ASP***
– douleurs abdominales importantes,
– météorisme (risque de mégacôlon toxique et de perforation).
Échographie abdominale et/ouTDM****
idem
RECTO-SIGMOÏDOSCOPIE
Pas toujours en 1reintention – recherche d'une colite pseudo-membraneuse en cas de suspicion d'infection à Clostridium difficile,
– certaines diarrhées sanglantes.
D'après O. Bouchaud.
* C Reactive Protein.
** Clostridium difficile.
*** Radio d'abdomen sans préparation.
**** Examen tomodensitométrique (scanner).
Antibiothérapie : indications
Notes préliminaires
– Éliminer d'abord une cause non infectieuse par l'interrogatoire.
– La présence de Candidas dans les selles n'a aucune valeur et ne doit pas entraîner la prescription d'un traitement antimycosique.
– En cas d'origine infectieuse, l'antibiothérapie (AB) ne doit cependant pas être systématique.
– L'AB éventuellement utilisée comporte habituellement : une quinolone, ou une céphalosporine de 3e génération, ou l'azithromycine.
Antibiothérapie empirique
– Diarrhée de type invasif (diarrhée glairo-sanglante, fièvre) avec signes de gravité.
– Pour certains, si les symptômes persistent plus de 3 jours, malgré un traitement symptomatique correct (sans ralentisseurs du transit, qui sont particulièrement contre-indiqués dans cette situation).
– Terrain fragile : personnes âgées, immunodépression, pathologie associée risquant de se décompenser.
– Origine amibienne probable (AB proposée : métronidazole).
– Suspicion de colite postantibiotique à Clostridium difficile dès que la coproculture avec recherche des toxines A et B a été faite, surtout si :
. tableau sévère (risque de mégacôlon toxique et de perforation) ;
. terrain fragile.
AB proposée :
– première intention : métronidazole, 500 mg x 2/j x 10 j ;
– deuxième intention (forme sévère ou échec du métronidazole) : vancomycine per os, 500 mg x 4/j.
Antibiothérapie adaptée à l'agent en cause
– Le tableau est sévère et/ou le terrain est fragile. On dispose d'une coproculture (ou d'une hémoculture).
– Il s'agit d'une typhoïde, d'une colite à Clostridium difficile (avec présence de toxine) ou d'une amibiase.
D'après O. Bouchaud.
Coproculture : indications*
a) Coproculture standard
avec recherche de Campylobacter ± Yersinia:
– diarrhée hémorragique,
– signes de gravité,
– terrain fragile,
– diarrhée persistant plus de 3 jours,
– origine bactérienne très probable,
– toxi-infection alimentaire collective.
b) Coproculture orientée
avec éventuelle recherche des toxines de Clostridium difficile** :
– retour d'un pays tropical, coproculture standard négative,
– syndrome cholériforme au retour d'un pays tropical,
– diarrhée liquide puis hémorragique et coproculture standard négative.
D'après O. Bouchaud.
* Éliminer d'abord une cause non infectieuse par l'interrogatoire.
** Diarrhée au cours ou au décours (2 mois) d'une antibiothérapie (AB) : il faut prescrire une recherche des toxines du Clostridium difficile si :
- la diarrhée persiste plus de 48 h après l'arrêt des AB, - l'arrêt des AB n'est pas possible, - la diarrhée est sévère, - le terrain est fragile.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature