Si on a eu le sentiment, aussitôt après la victoire électorale de Syriza, que les nouveaux dirigeants grecs avaient quelque peu modéré leurs exigences, il n’en fut rien. La visite de Yanis Varoufakis, le sympathique et décontracté ministre grec de l’Économie, dans les capitales européennes, avait détendu la situation. Les dirigeants européens mettaient un point d’honneur à ne pas contester une élection parfaitement démocratique et qui satisfaisait les vœux d’une large majorité grecque. La nouvelle équipe au pouvoir entendait démontrer aux leaders européens qu’elle n’était nullement composée d’illuminés ou d’irresponsables, qu’elle avait des compétences, qu’elle avait bel et bien l’intention de réformer la Grèce.
D’emblée, il ne fut pas possible pour M. Varoufakis de trouver la moindre forme de complaisance pour un effacement partiel de la dette grecque. Bien entendu, c’est à Berlin qu’il trouva la réaction la plus hostile à ses plans, en la personne du ministre allemand de l’Économie, le très intransigeant Wolfgang Schaüble.
Le gouvernement grec ne pouvait pas s’étonner de l’attitude des Européens. Certes, il est soutenu par des économistes prestigieux et même par des prix Nobel qui estiment que la politique d’austérité imposée à la Grèce par la troïka (BCE, Commission européenne et FMI) ne fait qu’appauvrir la Grèce et, en entraînant une croissance négative, l’empêche de dégager les excédents indispensables au remboursement des prêts contractés. Mais le nouveau gouvernement hérite d’une situation interne aggravée davantage par l’absence ou l’insuffisance de réformes que par la taille des emprunts. On pourrait même dire que le gouvernement de M. Tsipras, qui se revendique de la gauche, devrait avant toute chose, appliquer aux classes sociales grecques ses idées au lieu d’aller quémander une annulation de la dette.
Ce qui manque à la Grèce
En effet, les classes aisées de Grèce continuent à pratiquer joyeusement l’évasion fiscale. Pendant les années d’austérité, ce sont les classes moyennes et les retraités qui ont payé la facture tandis que les propriétaires de biens immobiliers continuaient d’échapper à la taxe foncière, que les armateurs menaçaient de donner à leurs navires des drapeaux étrangers si le gouvernement faisait mine de les taxer et que l’Église orthodoxe restait assise sur ses trésors. Ce n’est pas l’argent qui manque en Grèce, c’est le patriotisme des possédants. Dans ces conditions, n’est-il pas possible de dire qu’il est plus facile d’oublier la dette que d’aller chercher l’argent dans la poche de ceux qui l’ont ?
À quoi il faut s’empresser d’ajouter que même la troïka a mis de l’eau dans son vin et qu’elle reconnaît que le régime eau et pain sec a largement montré ses lacunes. C’est pourquoi on comprend mal que les Allemands s’en tiennent à des idées périmées. Si un accord doit être trouvé entre Athènes et les Européens, ce ne sera pas sur l’annulation d’une partie de la dette, mais sur un programme capable d’assurer la reprise économique. D’autant que les efforts des précédents gouvernements ont produit des résultats, avec une forte réduction du déficit budgétaire et un frémissement de la croissance. Il y a des querelles qui, en définitive, sont purement sémantiques. L’austérité aurait été perçue différemment par les Grecs si les classes moyennes n’avaient pas été écrasées par elle parce que les riches ne payaient pas leur juste part. Le gouvernement de M. Tsipras a tout le loisir de prouver qu’il est de gauche, non en tendant une sébile, mais en faisant casquer les riches.
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