Depuis deux ou trois ans, plusieurs études cliniques ont été lancées pour approfondir cette question. « On tend globalement à une désescalade », explique Jean-Louis Houpeau, du centre Oscar-Lambret (Lille). Premier argument : les résultats de l’étude ACOSOG Z011 publié en 2011. Cette étude prospective regroupait des femmes tumorectomisées, ayant reçu une radiothérapie mammaire et ayant des ganglions sentinelles envahis. Lorsqu’un ou deux ganglions étaient envahis, elles étaient randomisées entre un curage axillaire ou une abstention : leur suivi a montré qu’il n’y avait pas de différence entre ces deux cohortes en termes de survie sans progression et de survie globale. « Malgré quelques limites méthodologiques, cette étude est importante, car elle conforte l’idée que le curage axillaire n’est pas forcément bénéfique pour les patientes. » Une étude similaire, ne comprenant que des patients ayant des micrométastases IBCSG trial 23-01 et publiée en mars dernier, concluait la même chose.
D’autres études sont cependant attendues pour affiner un peu plus les stratégies. Et notamment l’étude française SERC, en cours de recrutement. « Un ACOSOG à la française, résume Jean-Louis Houpeau, à deux détails prêts : il réunira des patientes ayant une tumeur infiltrante ayant eu une chirurgie conservatrice mais aussi celle ayant eu une mastectomie. Par ailleurs, les conditions de radiothérapie seront mieux encadrées. On devrait ainsi s’affranchir des biais. » Autre étude en attente : « AMAROS randomise cette fois les patientes ayant des ganglions sentinelles envahis entre un curage et une irradiation du creux axillaire. Attendue dans les prochaines semaines ou mois, elle permettra d’étayer la décision, en mettant également en regard les morbidités liées à chacune des deux options. »
Le curage axillaire, en discussion après chimio
En attendant les prochaines données, comment les équipes médicales traduisent-elles aujourd'hui les données de cette étude ? « Les équipes se fondent sur le nombre et la nature de l’envahissement ganglionnaire identifié en extemporané ou à l'examen définitif. Si toutes systématisent le curage en cas de macrométastases ganglionnaires (›2 mm), d’autres, comme dans notre centre, utilisent des scores pour les aider dans la prise de décision sur les micrométastases : ce sont des méthodes de calcul prédictives du risque d’envahissement ganglionnaire non sentinelle. » Deux méthodes validées existent – le nomogramme du MSKCC et le score de Tenon – fondées sur des critères cliniques et anatomopathologiques (taille de la tumeur, nombre de ganglions envahis, type histologique…). Une méthode plus avancée de biologie moléculaires (automate Osna®), permettent de déterminer le type d’envahissement du ganglion sentinelle en analyse extemporanée. Ce type d’approche pourrait se développer à l’avenir.
Dans les tumeurs avancées, la méthode du ganglion sentinelle est aussi à l’étude depuis quelques années. Si le curage axillaire a été initialement systématique, il est aujourd’hui en discussion après chimiothérapie néoadjuvante : « On sait depuis GANEA-1 que pour les patientes chez lesquelles une chimothérapie néo-adjuvante est préalablement initiée, il est possible désormais de faire un ganglion sentinelle au moment de la chirurgie si l’évaluation initiale du creux axillaire – clinique et en imagerie – était négative (essai français GANEA 1). Depuis, l’étude GANEA-2 est en cours : elle étudie la même hypothèse chez celles pour lesquelles l’exploration s'est avérée positive. »
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