SANS LE DIRE aussi ouvertement, c'est quand même un avertissement – un conseil, tempéreront certains – que le ministre de la Santé a donné aux partenaires conventionnels, et notamment à l'assurance-maladie et au directeur de l'Uncam, lors du discours-bilan qu'il a prononcé en inaugurant le salon du MEDEC qui se tient jusqu'à ce soir au palais des Congrès à Paris.
Le propos est rusé. «Le problème duC à 23euros ne se résume pas à la seule question tarifaire, a dit en substance Xavier Bertrand, c'est avant tout un problème conventionnel, et cette voie conventionnelle doit être préservée. Or, si l'on casse cette voie, plus rien ne sera possible.»
On aura compris l'allusion : n'allez pas trop loin, n'allez pas jusqu'au point de non-retour, dit en substance le ministre, faute de quoi chacun pourrait le regretter. Et le ministre de rappeler au passage que personne n'a été pris au dépourvu dans cette affaire, puisque l'on sait «depuis 2002 que les premiers spécialistes de médecine générale sortiront des facultés en 2007 et que devait se poser dès lors le problème duC égale CS».
Mais Xavier Bertrand, qui savait qu'il s'adressait pour une des dernières fois aux médecins, a voulu leur livrer un message fort et leur annoncer des décisions, propres à les convaincre, s'il en était besoin, qu'il allait régler tous les problèmes importants avant son départ de l'avenue de Ségur.
«Tous les dossiers ouverts seront fermés lorsque je laisserai la place à mon successeur, a garanti Xavier Bertrand. J'ai toujours tenu mes engagements. D'ailleurs connaissez-vous un engagement que je n'ai pas tenu?»
Et, dans la foulée, le ministre d'annoncer qu'il allait rapidement débloquer le dossier du secteur optionnel, question qui empoisonne depuis près de trois ans maintenant les relations entre le gouvernement et les spécialistes – et notamment les chirurgiens.
Xavier Bertrand devait tenir hier soir une réunion sur le sujet et annoncer rapidement sa décision, car l'on sait que la loi lui en donne désormais la possibilité (les partenaires conventionnels n'étant pas parvenus à un accord au 1er mars sur ce dossier). Reste à savoir si la décision du ministre sera à même de satisfaire les premiers intéressés. Ceux-ci, à l'issue du discours du ministre, restaient quelque peu sur leur faim.
Autre dossier que le minitre veut vite débloquer : la reconnaissance de la médecine générale en tant que filière universitaire. Promis par le ministre de la Santé il y a plusieurs semaines, les premiers postes de chefs de clinique pour les internes de médecine générale seront ouverts dès la rentrée universitaire 2007. De même, les premières titularisations de généralistes professeurs de médecine générale devraient être effectives dans les prochaines semaines.
Pas de coercition pour l'installation.
Le problème de la démographie médicale reste un souci essentiel du ministre de la Santé. «Je suis attaché à la liberté de choix et d'installation», a redit M. Bertrand, qui fustige les projets qui voudraient imposer une obligation d'installation dans des zones sous-médicalisées. «Je ne crois pas à la coercition», a-t-il assuré. C'est dans ce contexte qu'il a annoncé qu'il allait signer «avant la fin de la semaine» l'avenant conventionnel accordant une hausse de 20 % de leurs honoraires aux généralistes de secteur I qui s'installent en cabinet de groupe dans des zones étiquetées « sous-médicalisées » par les missions régionales de santé. «Cette disposition sera ainsi applicable très rapidement et cela montre toute ma détermination à mettre en application des textes essentiels pour la démographie médicale.»
Le ministre a tenu à rappeler qu'il avait pris le dossier de la responsabilité civile professionnelle à bras-le-corps, et que celui-ci était, là aussi, en passe d'être réglé. «On m'avait dit que je ne parviendrais pas à le résoudre. Mais j'ai montré une nouvelle fois que je tenais mes engagements.»
Même chose pour le DMP. «Certains ne manquent pas d'ironiser sur certains retards. Mais je préfère,a expliqué Xavier Bertrand, prendre l'avis de la Commission nationale informatique et libertés et écouter le message des patients avant de décider.» Pour le ministre, le DMP sera un élément essentiel de la politique de santé des prochaines années, et il convient de prendre toutes les assurances pour que sa création soit une réussite.
Mais Xavier Bertrand, s'adressant à un auditoire qui, quelques instants auparavant, avait entendu les principaux candidats, ou leurs représentants, à l'élection présidentielle (voir page 4), n'a pas non plus voulu se priver de dresser un bilan très positif de son action. «Même s'il faut éviter, dit-il, de faire dans l'autosatisfaction.» N'empêche. Lorsque Xavier Bertrand annonce que le déficit de l'assurance-maladie sera inférieur à 6 milliards d'euros en 2006, alors que les prévisions tablaient sur un chiffre supérieur à 6 milliards, et lorsqu'il annonce que, en 2007, il sera à moins de 5 milliards, il ne peut cacher un certain plaisir. Et une nouvelle fois de répéter que, lorsqu'il était arrivé, avec Philippe Douste-Blazy, au ministère de la Santé, on était sur «une tendance d'un déficit de 16milliards d'euros».
«Voilà la réalité», s'est écrié Xavier Bertrand, prenant à témoin l'auditoire. Un résultat que le ministre attribue sans surprise à la réforme de l'assurance-maladie de 2004, et d'abord à l'institution du médecin traitant et du parcours de soins. On ne sait si le ministre fait en l'occurrence dans l'autosatisfaction, mais il est clair qu'il ne cache ni son plaisir ni sa satisfaction, qui est grande.
Un numerus clausus à 7 100
Xavier Bertrand a annoncé au MEDEC que le numerus clausus serait porté à 7 100 pour la rentrée universitaire 2007-2008, contre 7 000 en 2006. Une très légère augmentation, mais, a précisé Xavier Bertrand, l'effort devra être poursuivi au cours des prochaines années. Ce numerus clausus, a encore précisé le ministre de Santé, devra être décliné régionalement, selon les besoins démographiques et des spécialités et des capacités de formation.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature