La ventilation artificielle (VA) est le moyen le plus communément utilisé de maintenir en vie dans les unités de soins intensifs.
Les études rétrospectives et prospectives ont montré que, chez les patients en état critique, le décès est souvent précédé du retrait de ce support vital. Mais certains patients meurent alors qu'ils sont sous VA, tandis que d'autres en sont sevrés avec succès.
Les facteurs présidant à la décision des soignants d'arrêter la VA ne sont pas clairs. Par convention, on admet que les premiers déterminants sont constitués par l'âge, la gravité de la situation clinique et la présence ou non d'une défaillance organique.
L'étude, signée de Deborah Cook et coll., publiée par le Canadian Critical Care Trial Group, montre que la réalité est différente. Les investigateurs d'USI situées en Amérique du Nord et en Australie ont suivi en détail l'évolution de 851 patients sous VA.
Jugements subjectifs des médecins
Quatre déterminants de la prise de décision d'arrêt émergent. L'un d'entre eux est la confiance mise dans les médicaments inotropes ou vasopresseurs pour maintenir le patient en vie. Les trois autres impliquent des jugements subjectifs des médecins des USI : leur prédiction de la survie et des fonctions cognitives après la sortie de l'USI et leur perception des préférences des patients.
« De ce fait, nous influons sur la prise de décision en fonction de notre prévision de l'évolution du patient et la famille nous influence en nous aidant à comprendre les souhaits du patient », commente Jeffrey M. Drazen, dans un éditorial.
Le médecin averti est conscient, poursuit-il, que ses propres biais donnent une couleur aux interactions avec les familles et peuvent influer sur leurs perceptions des préférences du patient. Les auteurs, pour leur part, notent « la quasi-impossibilité de relayer leurs prédictions aux familles des patients sans, pour une part, influer sur leur décision ».
Aussi, tous invitent à une réflexion sur les façons de présenter les informations aux patients et aux familles.
Les 851 patients (âge moyen de 61,2 ans) étaient sous VA pour atteinte : pulmonaire (215), cardio-vasculaire (109), gastro-intestinale (132), du système nerveux central (130), arrêt cardio-pulmonaire (87), sepsis (65) ou d'autres causes (113). Ils ont été inclus sur le critère d'un séjour en USI devant durer plus de 72 heures.
Taux de mortalité global de 96,4 %
L'évaluation montre que 539 (63,3 %) ont été sevrés avec succès, 146 (17,2 %) sont morts sous VA. Parmi les 166 autres à qui l'assistance respiratoire mécanique a été retirée, 154 sont décédés en USI et 15 à l'hôpital dans un autre service. Ce qui donne un taux de mortalité global de 96,4 %. Parmi les 304 cas de décès dans l'USI, 201 sont décédés par suite du retrait d'une ou plusieurs des mesures suivantes : VA, inotropes, vasopresseurs ou dialyse. Chez environ la moitié des patients effectivement décédés, l'appareil avait été retiré en prévision de cette issue défavorable. Néanmoins, 6 personnes ont survécu et sont même sorties de l'hôpital.
« Nous n'avons trouvé aucune association indépendante entre le retrait de la VA et l'âge du patient, ou le statut fonctionnel antérieur, ou la sévérité de la maladie, ou la sévérité du dysfonctionnement organique. » A côté de cela, la dépendance aux vasopresseurs ou aux inotropes, en tant que deuxième moyen de support vital, ainsi qu'une probabilité de survie en USI inférieure à 10 % sont fortement associées au retrait de la VA.
« Nos résultats sont encourageants, car ils montrent que la décision du retrait du support vital en réanimation doit prendre en considération les souhaits des patients. » Ce qui montre aussi qu'il faut s'intéresser au problème des patients qui ne peuvent formuler leurs préférences ou qui ne peuvent être représentés de manière fiable par la famille ou par un médecin.
« New England Journal of Medicine », 8 septembre 2003, pp. 1123-1132 et commentaire pp. 1109-1110.
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