Un Isrs en test

La dapoxetine contre l’éjaculation prématurée

Publié le 10/09/2006
Article réservé aux abonnés

UN NOUVEL inhibiteur spécifique de la recapture de la sérotonine (Isrs) à demi-vie très courte, la dapoxetine, devrait permettre la prise en charge d’un problème dont souffrent de 21 à 33 % des hommes : l’éjaculation précoce. Les effets secondaires sexuels des molécules de cette famille de nouveaux antidépresseurs ont très rapidement été signalés, dès leur commercialisation. Dans un premier temps, ce sont surtout des dysfonctions érectiles et des pertes de la libido qui ont été rapportées. Mais, secondairement, les services de pharmacovigilance ont été informés d’un effet retardateur sur l’éjaculation chez certains patients. D’où l’idée de développer une molécule spécifique à action rapide (agit en moins d’une heure et s’élimine en deux heures) qui pourrait être utilisée à la demande afin de limiter des éjaculations précoces.

L’équipe des sexologues de l’université de Minnesota ont mis en place une étude de phase III prospective en double aveugle contre placebo et d’une durée totale de douze semaines. Les 2 614 hommes hétérosexuels inclus devaient présenter une éjaculation précoce modérée à sévère (trois éjaculations intravaginales sur quatre au cours des deux dernières semaines ayant duré moins de deux minutes). Trois groupes ont été tirés au sort : 870 hommes ont reçu des comprimés de placebo (à la dose de deux comprimés par semaine pendant douze semaines), 874 des comprimés de dapoxetine dosés à 30 mg et 870 à 60 mg. La latence entre la pénétration intravaginale et l’éjaculation (IELT, Intravaginal Ejaculatory Latence Time) était respectivement de 0,90, 0,92 et 0,91 minutes dans les trois groupes au moment de l’inclusion.

Dès la 30 e minute après la prise.

A la fin des douze semaines d’étude, ces durées étaient passées respectivement à 1,75, 2,78 et 3,32 minutes. L’effet des deux doses de dapoxetine était significatif dès la première utilisation et un plateau a été observé à partir de la 8 e semaine. Dès la 30 e minute après la prise médicamenteuse, l’IELT s’élevait de façon significative dans les deux groupes traités et cet effet se maintenait jusqu’à plus de quatre heures après la prise.

A l’entrée dans l’étude, moins de 5 % des hommes des trois groupes déclaraient avoir un contrôle sur leur éjaculation. Dès la 4 e semaine, ils étaient près de 50 % dans les deux groupes dapoxetine à estimer pouvoir contrôler de façon au moins minimale leur éjaculation.

Des patients plus confiants en eux.

Enfin, les auteurs se sont intéressés à l’appréciation par les hommes de leurs rapports sexuels. En début d’étude, un homme sur deux se déclarait satisfait (de moyennement jusqu’à très) de l’acte sexuel. Ce pourcentage a augmenté de façon très significative chez les hommes sous traitement actif passant à 75 à 80 % dans le groupe dapoxetine 60 mg et à 65 à 70 % dans le groupe dapoxetine 30 mg.

Pour les éditorialistes, deux urologues italiens, les Drs Francesco Montoris et Andrea Salonia (Milan), «ce type de traitement peut permettre aux hommes souffrant d’éjaculation précoce d’améliorer leur confiance en eux tout en évitant d’être obligés de recourir à un traitement au long cours. Les bons résultats sur la tolérance laissent penser que ce type de traitement pourrait s’inscrire facilement dans l’arsenal thérapeutique».

« The Lancet », vol. 368, pp. 894-869 et 929-937, 9 septembre 2006.

> Dr PIERRE CONSTANT

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8005