Même si la journée « santé libérée » organisée à l'initiative conjointe de la CSMF, du SML et d'Alliance n'a pas fait l'unanimité dans le corps médical, loin s'en faut, certains comptent aller plus loin.
Le Dr Michel Chassang, président de la Confédération, est en tout cas persuadé qu'il y a là un concept « révolutionnaire » à creuser malgré les réticences « normales » d'une partie du corps médical. « Cette journée a vocation à être reproduite, explique-t-il. Est-ce que ce sera un jour par semaine, ou tous les quinze jours ? Je ne sais pas encore mais il s'agit de créer un espace-temps, parfaitement lisible et identifié, au cours duquel les honoraires pourront être supérieurs aux tarifs conventionnels. C'est une expérimentation grandeur nature de l'espace de liberté. » Ce jour-là, le mercredi par exemple, les médecins en secteur I pourraient alors partager avec les patients qui le souhaitent, en parfaite connaissance de cause, une médecine plus lente et plus à l'écoute. Mais aussi plus chère (hors urgences et hors CMU) dans le cadre de l'application légale d'un DE correspondant à des circonstances exceptionnelles de temps. « Il s'agirait de quelques euros de plus », relativise le Dr Chassang. Qu'on se le dise en tout cas : la philosophie des journées « santé libérée » n'est « ni ludique ni marrante ». Elle vise à briser progressivement le tabou tarifaire sans céder aux sirènes de ceux qui prônent la « libéralisation totale des prix en médecine ».
Séquelles de la rupture conventionnelle
En attendant la réforme de l'assurance-maladie que la CSMF juge « incontournable », cette initiative, qui concerne aussi bien les généralistes que les spécialistes en secteur I, est aussi une manière de prolonger le mouvement de protestation des médecins libéraux. Grogne des spécialistes d'abord, qui attendent toujours « d'un jour à l'autre » la publication du règlement conventionnel minimum (RCM). « Si les choses traînent, c'est parce qu'il y a en ce moment des arbitrages douloureux et difficiles », analyse le Dr Chassang. Mais aussi mécontentement larvé des généralistes qui ont toujours la « même mauvaise convention vide de sens, et qui conduit à un système à la britannique ».
Consciente que la situation financière de l'assurance-maladie n'est « pas brillante » (16 milliards d'euros de déficit cumulé sur deux ans) et que la plupart des tentatives pour maîtriser les dépenses ont échoué, la CSMF espère avec ces journées « santé libérée » ouvrir le débat sur le panier de soins, autrement dit sur ce que la solidarité nationale doit assumer. Pour le syndicat, les prestations et services qui, « sur la base de critères médicaux » seront inclus dans ce panier de soins, ont vocation à être remboursés par les régimes obligatoires, à 100 %. A l'inverse, ce qui n'y est pas relèverait des assurances complémentaires ou d'un effort personnel. « Aujourd'hui, explique le Dr Chassang, l'assurance-maladie n'est plus une assurance-catastrophe, comme en 1945. Il y a les actes et prestations prioritaires mais aussi une forte demande de confort et de bien-être, sans compter des exigences et des comportements individuels. » Pour la CSMF, la responsabilisation, y compris financière, des patients est un des piliers de la réforme de l'assurance-maladie. La répétition de journées « santé libérée » est une façon d'aider à cette prise de conscience collective.
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