À L'AUBE d'une période jugée «historique» pour l'avenir du système de santé français, la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français) a décidé d'afficher ses ambitions et ses exigences. Au lendemain de son conseil confédéral, le message est clair : le syndicat, signataire de la convention de 2005 et partenaire «loyal» des réformes en cours, a toujours l'intention de s'impliquer, mais il ne le fera pas à n'importe quel prix.
Le message en forme de mise en garde politique s'adresse aussi bien au gouvernement qu'à l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (UNCAM). «Les médecins libéraux sont extrêmement troublés et inquiets,résume le Dr Michel Chassang, président de la Confédération. D'un côté, il y a une volonté de participer aux chantiers annoncés, d'autant que, contrairement à 2004, la réforme promet de s'attaquer à l'hôpital et au financement. Mais nous redoutons un scénario catastrophe…»
La CSMF a adopté cinq motions comme autant de signaux d'alarme.
Les libéraux dans les clous.
La première concerne le plan de redressement de 500 millions d'euros qui, selon certaines informations, serait en préparation à Bercy pour contenir toute dérive des dépenses d'assurance-maladie en 2008 (le comité d'alerte a fait état d'un risque de dépassement compris entre 500 et 900 millions d'euros). «Des mesures de rigueur contre la médecine de ville [baisse ciblée des tarifs, par exemple] seraientextrêmement mal vécues aujourd'hui, prévient le Dr Chassang. Les médecins déclinent toute responsabilité, puisque l'évolution des soins de ville est extrêmement modérée depuis des mois et que l'activité diminue même en médecine générale.» L'an passé, à la même époque, des mesures d'économies avaient notamment été décidées contre les radiologues, avec une diminution des tarifs des actes d'imagerie. Le gouvernement pourrait dévoiler ses intentions à l'occasion de la réunion de la commission des comptes de la Sécurité sociale, le 18 juin. Mais, pour la CSMF, des mesures autoritaires, quelles qu'elles soient, auraient un effet «dévastateur et démobilisateur».
La deuxième inquiétude (et seconde motion) concerne le sort du système conventionnel, au point mort depuis six mois. Aucun avenant n'a été signé depuis décembre 2007. Le C à 23 euros est toujours un slogan. Et les spécialités cliniques qui ont subi les effets du parcours de soins ne voient rien venir. Dans ce contexte, la CSMF exige de l'assurance-maladie qu'elle donne «des gages» immédiats. Le conseil de l'UNCAM, où délibèrent les partenaires sociaux, doit se réunir demain, 12 juin, pour arrêter les «orientations» des négociations… 2008. Pour la CSMF, cette négociation doit s'ouvrir aussitôt et aboutir «d'ici au 14 juillet» avec un programme calé sur deux ans, jusqu'à l'échéance de la convention actuelle (2010).
La troisième motion confédérale appelle un «vrai débat démocratique» autour de la loi Santé, patients et territoires (SPT) que Roselyne Bachelot défendra à l'automne. Or le gouvernement a laissé entendre qu'il pourrait recourir à la procédure des ordonnances pour appliquer certains chapitres de ce texte. «La CSMF se souvient de l'échec du plan Juppé [imposé par ordonnances] et du désastre économique et structurel qui s'est ensuivi pour notre système de santé»,lit-on dans cette motion, qui exhorte à ne pas rééditer les «erreurs» du passé.
Une motion spécifique est réservée à l'EPP et à la FMC, «l'affaire de la profession». Face au «manque de lisibilité» des intentions du gouvernement, qui réclame désormais une «obligation de résultat»,la CSMF avance sa feuille de route : respect du «quadripartisme» dans l'organisation de la FMC(université, associations, Ordre, syndicats), refus de toute forme de certification , simplification du circuit de validation, redéfinition de la place des acteurs (HAS, unions, ordres régionaux, CME…), augmentation significative des «dotations publiques ou privées» pour le financement ou encore reconnaissance des efforts déjà entrepris par les médecins. S'agissant enfin de la gestion fiscale, la CSMF demande au gouvernement des «garanties» sur l'avenir des organismes de gestion agréés (OGA), une solution jugée «raisonnable» et adaptée aux besoins des médecins libéraux.
Pour la FMF, la convention c'est toujours non
Niet. La Fédération des médecins de France (FMF), qui a réuni son assemblée générale extraordinaire, a refusé à la quasi-unanimité (95 % des voix) d'adhérer à la convention actuelle et de siéger dans les instances paritaires locales qui sont les relais de la vie conventionnelle sur le terrain.
En revanche, le syndicat entend utiliser l'espace ouvert par l'article 5.3 de la convention qui permet à tous les syndicats représentatifs de participer à des «sessions de travail» avec l'assurance-maladie (sur les projets d'avenants, les thèmes de formation continue, le parcours de soins, la maîtrise médicalisée...). La FMF se réserve donc la possibilité de «signer des avenants» à la carte (comme elle l'avait fait sur la permanence des soins) sans adhérer à la convention.
Le syndicat compte également participer à toutes les réunions préparatoires dans le cadre de la concertation sur le projet de loi Santé.
La FMF a par ailleurs adopté une motion concernant le régime ASV pour lequel elle demande une «solution immédiate et honorable».
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