LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ libéraux se sont trouvé une place dans le projet de loi de réforme de l'assurance-maladie, depuis que la commission spéciale chargée d'examiner le texte à l'Assemblée nationale a adopté un nouvel amendement prévoyant une « union nationale » chargée de regrouper les représentants des professions de santé. Cet amendement, présenté par le Pr Jean-Michel Dubernard, rapporteur de cette commission spéciale, précise que la future Union nationale des professions de santé émettra « des avis sur les propositions de décisions de l'union nationale des caisses d'assurance-maladie (Uncam) », notamment en ce qui concerne la participation financière de un euro des patients par acte médical.
Il y a quelques jours, le Centre national des professions de santé (Cnps) revendiquait « la place qui lui revient » dans la nouvelle gouvernance (« le Quotidien » du 22 juin). Aujourd'hui, l'Union nationale des professions libérales (Unapl) « soutient » l'amendement Dubernard créant une Union nationale des professions de santé et « estime que le Cnps devrait être cette nouvelle structure ».
Malgré cet amendement, douze organisations syndicales (soit un peu moins de la moitié des syndicats siégeant au Cnps) pensent que la question de la représentation des professionnels de santé libéraux est loin d'être réglée (1).
Au nom de « la nécessaire dimension interprofessionnelle des soins de ville », elles réclament, dans une déclaration commune, la création d'une union nationale des professions de santé avec des missions de représentation et de négociation d'accords interprofessionnels, « un conseil national (et des) conseils de région identifiant un collège par profession ». Dans leur esprit, cette structure s'ajouterait au Cnps.
Pour le président de MG-France, l'amendement Dubernard est « incomplet » et peut être de toute façon biffé à tout moment par les députés ou les sénateurs. D'autant qu'il existe, note le Dr Pierre Costes, une « contre-mobilisation » des organismes d'assurance-maladie « qui n'ont pas envie d'avoir des partenaires renforcés ». Les professionnels de santé libéraux pourraient bien « se révolter contre la loi et la réforme s'ils en sont exclus », prévient-il.
Le Dr Jean-Gabriel Brun, président de l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (Uccsf-Alliance), voit aussi dans l'Union nationale des professions de santé le seul moyen de peser face aux « mastodontes » de l'Uncam et de l'union des complémentaires santé. L'appel lancé à l'initiative de MG-France ne rassemble « pas tout le monde, mais ça viendra », pronostique le Dr Brun, qui juge le Cnps « paralysé » et « has been ». « Le Cnps a du mal à se réformer pour avoir une représentativité interprofessionnelle, car ses statuts ne le lui permettent pas : on l'a vu avec l'Acip », renchérit Jean Benoît, président du Syndicat des biologistes (SDB).
L'accord-cadre interprofessionnel (Acip), négocié fin 2002 entre le Cnps et les caisses d'assurance-maladie, est resté finalement lettre morte car il n'a pu être validé en interne par le Cnps en raison d'un blocage de plusieurs syndicats, dont la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf). Jean Benoît verrait bien une union nationale « idéale avec une voix par profession », indépendamment du poids démographique des uns et des autres. Cela suppose, souligne-t-il, « un effort important demandé aux médecins pour qu'ils acceptent et comprennent de fonctionner en équipe de soins, même si personne ne conteste le rôle pivot du médecin en soins de ville ».
Quoi qu'il en soit, le président de la Csmf ne semble pas prêt d'accepter cette main tendue. « Sans la signature des syndicats médicaux Csmf, SML, FMF, de la Cnsd pour les chirurgiens-dentistes et des sages-femmes, ce n'est pas une démarche consensuelle », note le Dr Michel Chassang. Sur le fond, il fait valoir qu' « une structure existe déjà, c'est le Cnps, et (qu') il est inutile d'en créer une autre ».
Un avis partagé par le président du Cnps (qui doit remettre son mandat à l'automne), le Dr Jacques Reignault. Ce dernier craint que la « médiatisation (de l'appel des douze syndicats) nuise à l'unité (et) rajoute à la confusion ».
(1) L'appel est signé d'ores et déjà par les responsables des syndicats médicaux MG-France et Uccsf-Alliance, de l'Ujcd-Union dentaire, des syndicats infirmiers (FNI et Convergence Infirmière), de la Ffmkr (kinés), de la Fspf et de l'Unpf (pharmaciens), de la FNO (orthophonistes), du Snao (orthoptistes), de la FNP (podologues).
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