Expulsés du squat de Cachan

La crainte d’une crise sanitaire

Publié le 21/09/2006
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LE PRÉFET du Val-de-Marne, Bernard Tomasini, a annoncé mardi qu’un cas de tuberculose a été diagnostiqué chez une jeune femme de 29 ans ayant séjourné au centre sportif Belle-image dans lequel sont hébergés des centaines de personnes, en majorité d’origine africaine, expulsées le 17 août dernier d’un bâtiment du Crous qu’elles occupaient illégalement. La maladie était suspectée chez cette jeune femme hospitalisée depuis le 7 septembre, mais les premiers examens étaient «négatifs». Des examens complémentaires viennent donc de confirmer une tuberculose. Il s’agit, selon le Dr Cyril Rousseau, médecin inspecteur de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (Ddass), «d’une forme faiblement contagieuse», et, pour l’heure, la situation n’est pas épidémique. Les autorités préfectorales affirment par ailleurs qu’il n’y a pas de signes en faveur de l’existence d’autres cas depuis le 7 septembre.

Appel à se faire dépister.

Toutefois, elles appellent toutes les personnes qui ont été en contact avec la patiente à se faire dépister. Une réunion technique entre toutes les parties concernées, le conseil général, compétent en la matière depuis 1983, la Ddass et la préfecture devait déterminer avant la fin de la semaine les mesures à mettre en place dans cette situation difficile qui a connu de multiples épisodes.

L’ordre d’expulsion est prononcé par le préfet à la mi-août, en raison des risques incendie et sanitaires croissants. Plus de 500 personnes, dont plusieurs en situation irrégulière, occupaient le bâtiment du Crous et refusent pour la majorité les solutions d’hébergement d’urgence en hôtel qui leur sont proposées, préférant camper près de leur ancien squat. Dès le lendemain, le campement est évacué par les forces de l’ordre. Le député-maire PS de Cachan, Jean-Yves Le Bouillonnec, propose alors de mettre à la disposition des expulsés un gymnase de la ville.

Depuis, les épisodes se succèdent et le bras de fer continue entre les autorités et les ex-squatteurs qui ont reçu le soutien de plusieurs associations et personnalités du monde politique, culturel ou sportif. Le 19 septembre, des incidents ont encore opposé plusieurs personnes du gymnase et les forces de l’ordre à la suite d’un contrôle «vécu par les hébergés comme une nouvelle provocation, après de nombreuses interpellations, dont celle hier d’un père de famille sur le chemin de l’école», explique Jean-Yves Le Bouillonnec.

Au conseil général du Val-de-Marne, le président Christian Favier (PCF) dénonce dès le début une grave crise humanitaire. Les chiffres divergent, mais selon le conseil général, ce sont 400 personnes, dont 156 enfants, qui vivent dans un local de 10 m sur 20, dans des conditions de promiscuité intolérables. Les deux élus ont proposé l’ouverture de locaux du CEA. Leur proposition, soutenue par Joseph Rossignol, maire de Limeil-Brévannes, où se trouve les locaux, a été rejetée par la préfecture.

Dispositions exceptionnelles.

La confirmation du cas de tuberculose est venue confirmer leur crainte d’une crise sanitaire venant doubler la crise humanitaire. «Nous craignons aussi que d’autres soient touchées, notamment les personnes qui étaient en contact avec la malade avant l’expulsion et qui sont maintenant dispersées sur plusieurs départements», dit au « Quotidien » Yves Talhouarn, du pôle prévention et action sociale du conseil général. Dans un communiqué, son président a demandé au ministère de la Santé et au préfet «de prendre immédiatement des dispositions exceptionnelles», permettant de dépister l’ensemble de ceux qui ont été expulsés. «Il y a urgence, poursuit-il, à identifier le risque d’une éventuelle propagation parmi les hébergés du gymnase et à leur garantir un suivi sanitaire.» Selon lui, «seule la réquisition de bâtiments hospitaliers» susceptibles d’accueillir l’ensemble de ces personnes est de nature à permettre la mise en oeuvre de l’ensemble des mesures de dépistage et de traitement qu’appelle une telle situation.

> Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8014