Le chapitre du rapport de la Cour des comptes 2001 sur la Sécurité sociale consacré à « la régulation des soins de ville » dresse un constat extrêmement critique du mode de régulation instauré par loi de financement de la Sécu pour 2000. Et il donne largement raison à la très grande majorité des professionnels de santé libéraux qui s'opposent depuis deux ans à ce système de maîtrise basé sur la délégation à la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) d'un objectif de dépenses de ville (pour gérer principalement les honoraires des libéraux), avec trois rapports d'équilibre en cours d'année, avec éventuellement à la clé la baisse du tarif des actes.
Pour les magistrats, ce nouveau mode de régulation « n'a pas fait ses preuves ». Non seulement ce système d'ajustements tarifaires périodiques est honni par la quasi-totalité des professionnels de santé auxquels il est censé s'appliquer, mais il n'a « pas donné les résultats escomptés ». La Cour des comptes souligne qu'en 2000 l'objectif des dépenses déléguées (ODD), dont sont responsables les caisses, a été dépassé de 5,1 milliards de francs. Pire, en 2001, l'ODD n'a été transmis par l'Etat à la CNAM qu'à la mi-avril, ce qui a rendu impossible l'établissement d'un rapport d'équilibre en début d'année (sur les honoraires des professionnels de santé libéraux). Selon la Cour des comptes, cela « semble traduire une diminution de l'intérêt porté par l'Etat à cette tentative d'instituer un nouveau mode de régulation ».
Sur les modalités mêmes de la régulation, la Cour est sévère : « Prévoir trois rapports d'équilibre en une année est peu réaliste : la négociation devient permanente (...). Au surplus, les conditions sociopolitiques du bon usage de cet instrument ne sont pas réunies aujourd'hui. »
Les magistrats ne se montrent guère plus convaincus par les autres dispositions prévues par la LFSS 2000 dans le domaine de la régulation des soins de ville. « Aucun accord de bon usage des soins ni aucun contrat de bonne pratique n'a été conclu en 2000 », observe la Cour. Il n'existe pas non plus, ajoute le rapport, de bilan d'application de la mesure obligeant les médecins à mentionner la justification médicale de la prescription des arrêts de travail et des transports de malades mais, « il ne semble pas que cette mesure ait pour l'instant modéré les prescriptions » (+ 8,2 % pour les indemnités journalières en 2000).
Enfin, la disposition originale donnant aux médecins-conseils des caisses des pouvoirs de contrôle sur les patients « gros consommateurs de soins » a toujours, selon la Cour des comptes, « été peu appliquée », sans bilan disponible.
Par ailleurs, comme nous l'avions révélé (« le Quotidien » du 10 septembre), la Cour considère que la politique du médicament doit être profondément modifiée. Pour les magistrats, il faudrait notamment améliorer la « réactivité » du dispositif global (examen beaucoup plus fréquent du service rendu par chaque médicament et des prix) mais aussi délivrer une information plus indépendante et objective aux prescripteurs.
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