La Cour de cassation a finalement joué la Sécu contre les médecins. Le Dr Claude Leicher, président de MG France, et ses huit confrères de la Drôme qui avaient opté depuis près de trois ans pour la cotation Cs à 23 euros pour leur consultation de médecin généraliste viennent de l’apprendre à leurs dépens. Dans l’arrêt qui a été rendu public jeudi 8 avril à 14 heures, la Cour de cassation a en effet tranché en faveur de la CPAM de la Drôme, qui s’était pourvue en cassation contre une décision de justice précédente : celle de la Cour d’appel de Grenoble qui avait en mars 2009 conclu qu’au contraire les neuf généralistes de la Drôme étaient en droit d’utiliser le Cs pour coter leurs consultations. La Cour de Cassation a en effet estimé, suivant l’avis émis par l’avocat général lors de l’audience publique du 11 mars dernier, que le Dr Leicher comme ses huit confrères « n’exerce pas, à titre exclusif, une spécialité au sens des textes » législatifs et réglementaires. Rappelant notamment que des conventions spécifiques peuvent être signées avec les spécialistes et avec les généralistes, la Cour conclut que « le généraliste doit s’entendre du praticien qui exerce la médecine générale, et le spécialiste du praticien qui exerce, à titre exclusif, une spécialité déterminée ».
Cette décision intervient alors qu’une partie de la profession est en grève ce jeudi 8 avril et va probablement mettre le feu aux poudres. D’autres affaires en cours actuellement devraient pâtir de la même interprétation restrictive sur Cs. Et il est bien sûr à craindre que, dans ce contexte, le règlement arbitral que doit proposer Bertrand Fragonard le 20 avril prochain n’inclura pas de revalorisation des honoraires des généralistes comme le réclament les syndicats de médecins libéraux. « La Cour de cassation aurait pu éviter un conflit tarifaire qui ne pourra être sauvé désormais que par le règlement arbitral, » estime pourtant le Dr jean-Paul hamon, co-président d’Union généraliste. Pour MG France, la Cour de cassation par cet arrêt « donne tort aux parlementaires ayant voté la loi du 17 janvier 2002, instituant la spécialité de médecine générale ». MG France constate que « depuis cette date les médecins généralistes ont été trompés. La médecine générale est certes une spécialité, mais pas une spécialité comme les autres. La discrimination continue ».
Leicher maintient son mot d’ordre de Cs... et Chassang sa consigne de C à 23 euros
Le syndicat de Claude Leicher poursuit néanmoins son mot d’ordre de cotation CS par les médecins généralistes et en appelle au chef de l’État. « En l'absence de réponse positive à cette juste revendication MG France est prêt à accompagner les confrères dans un mouvement de protestation encore plus ferme et plus durable » poursuit le syndicat. Le feuilleton judiciaire n’est pas pour autant terminé. La Cour de Cassation a renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel de Lyon. Mais il y a peu de chance qu’un nouveau revirement se produise. En revanche, les espoirs des « neuf de la Drôme » se tournent dorénavant vers la Cour européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg, devant laquelle ils entendent « poursuivre le combat ».
Sans attendre, la CSMF tire déjà, à sa manière, les conclusions de cette affaire: « Cela montre bien que ce n’était pas la voie juridique qu’il fallait privilégier. La solution passe par une réforme de la nomenclature, et ce que que la CSMF demande: disparition du C et du Cs, remplacés par une nomenclature unique pour tous les acte, » estime Michel Chassang. Du même coup, le président de la CSMF se sent conforté dans sa stratégie: « Il faut d’abord faire en sorte que que les signatures soient honorées. Aussi invitons nous tous les généralistes à nous rejoindre sur le C à 23 euros dès lundi matin». De son côté, l’Assurance maladie a poussé un ouf de soulagement. Dans un communiqué, elle s’est félicitée que cette « décision confirme le bien fondé du pourvoi en cassation formé par l’Assurance Maladie et conforte le principe d’une rémunération adaptée aux particularités de chaque spécialité médicale ». Selon elle, « le code de la Sécurité sociale distingue en effet les consultations de médecine générale et de médecine de spécialité qui sont deux modes de recours aux soins différents ». Si la première bataille judiciaire du CS a été perdue, la guerre se joue désormais surtout sur le champ conventionnel et politique.
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