La veuve et les enfants de Richard Gourlain, fumeur depuis l'âge de 13 ans et mort à 50 ans de cancers des poumons et de la langue, réclamaient au fabricant de cigarettes Altadis (ex-SEITA) 457 000 euros de dommages-intérêts, en soutenant que la société n'avait pas informé leur mari et père des risques qu'il prenait.
Dans un jugement qui devrait limiter en France les procès contre les cigarettiers, la Cour de cassation a exclu une responsabilité de principe de ceux-ci dans les maladies liées au tabac, suivant l'avis de l'avocat général lors de l'audience du 24 octobre.
Avant 1976, date de la promulgation de la loi Veil, le défaut d'information ne peut être reproché à la SEITA, car « les autorités gouvernementales, dont le ministre des Finances, autorité de tutelle de la SEITA, informées dès avant 1964 des dangers liés à la consommation excessive de tabac, divergeaient sur le caractère impératif et sur les modalités de l'information à fournir à la population ». Et la Cour de citer les alertes lancée par les ministres de la Santé en 1964, 1968 et 1971, notamment, sans être entendues par les ministres des Finances.
Après 1976, c'est la responsabilité individuelle de Richard Gourlain qui est en cause : « Agé de 27 ans en 1976, (il) ne pouvait alors ignorer les méfaits de l'usage abusif du tabac, non seulement du fait de l'information légale portée sur les paquets de cigarettes, mais encore du fait de toutes les informations présentées à la connaissance de tous par les médias, presse et radio-télévision. » Or, « seul à pouvoir prendre les décisions qui s'imposaient », il n'a pas changé d'attitude, bien qu'il ait vu un proche mourir d'un cancer du poumon et qu'il ait lui-même été atteint d'un premier cancer en 1988. Une « faute volontaire et persistante », avait estimé l'avocat général.
La fabrication de cigarettes n'est pas critiquable, a même conclu la Cour, car la cigarette n'est pas dangereuse en elle-même, mais par l'abus du consommateur. L'avocat d'Altadis est comblé par ce jugement : « Celui qui fume assume son risque. Nous ne sommes pas dans une société américaine, c'est une décision sage. » Pour la veuve de Richard Gourlain, qui répète que, « pour certains fumeurs, la liberté d'arrêter n'existe plus », le combat continue : elle a engagé une procédure contre l'Etat devant le tribunal administratif d'Orléans.
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