PHILIPPE DOUSTE-BLAZY ne souhaitait-il pas que le débat parlementaire fût l'occasion de « faire évoluer » le projet gouvernemental ? Et de l' « améliorer » ? Ses vœux pourraient être exaucés au-delà de ses espérances à l'occasion du marathon de juillet. Examiné en première lecture par les députés à partir du 29 juin, les 45 articles du projet de loi, répartis en trois volets (organisation des soins, gouvernance et mesures financières) pourraient évoluer sensiblement.
Au-delà de la bataille que va livrer le PS (par le biais de « 80 amendements de fond »), mais surtout les communistes, qui feront durer au maximum les joutes dans l'hémicycle, les députés de la majorité entendent bien, eux aussi, « améliorer »« recadrer », « clarifier », et parfois « durcir » la copie du gouvernement. C'est en tout cas ce qu'explique en substance Yves Bur (UMP, Bas-Rhin), qui coordonne les travaux parlementaires à la tête de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi sur l'assurance-maladie.
Pour de nombreux élus de droite, certains chapitres du volet « gouvernance » sont mal ficelés ou incomplets. Beaucoup souhaitent que le projet de loi renforce encore le « pilotage régional » sur les réseaux, la prévention ou la permanence des soins, mais aussi que l'hôpital soit davantage impliqué dans la réforme. « Nous voulons introduire plus lisiblement la notion de maîtrise médicalisée à l'hôpital, dans la production des actes », explique Yves Bur. Protocoles de soins, référentiels médicaux, dossier médical, et respect des objectifs de dépenses : l'hôpital doit « rendre des comptes », résume un député.
Forfait de un euro : tous concernés ?
Le volet de la responsabilisation financière des patients fait également débat. Dans la ligne de mire des députés UMP : les exonérations que le gouvernement envisage d'accorder pour la franchise de un euro par consultation (aux enfants de moins de 16 ans, bénéficiaires de la CMU, femmes enceintes, passages aux urgences...). Beaucoup de parlementaires estiment au contraire qu'il faut impliquer le plus grand nombre, tout en plafonnant le montant annuel de cette contribution (afin de ne pas pénaliser les malades chroniques). « La question est de savoir si on peut éduquer les assurés en réservant ce forfait à une catégorie résiduelle? », s'interroge Yves Bur.
Le choix du gouvernement de prolonger la durée de vie de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) « jusqu'à l'achèvement du remboursement » des déficits cumulés (35 milliards d'euros fin 2004 et sans doute 15 milliards supplémentaires pour les exercices 2005 et 2006), autrement dit de charger la barque des générations futures sans limite de durée, est rejeté par un nombre significatif de députés UMP. « Beaucoup s'interrogent sur notre responsabilité collective dans cette affaire, c'est pourquoi nous voudrions fixer une date limite, pourquoi pas 2020, quitte à relever le taux actuel de la contribution (0,5 % des revenus) », annonce Yves Bur .
Sur l'organisation des soins, le futur dispositif de médecin traitant s'annonce comme un autre sujet délicat. Même si le gouvernement a largement renvoyé l'application de ce chapitre à un futur décret (conditions de la modulation du ticket modérateur) et aux prochaines négociations conventionnelles (désignation du médecin traitant, rémunération, modalités du dépassement accordé à certains spécialistes consultés en accès direct), les députés souhaitent que la loi rende cette « filière » plus lisible par l'ensemble des patients et lui donne une certaine souplesse. « Le risque est de construire une usine à gaz à partir d'une notion simple et de bon sens », s'inquiète Yves Bur . « Notre première préoccupation, ajoute-t-il, est d'éviter les files d'attente (chez les spécialistes) et d'empêcher que le nouveau système n'aboutisse à une ségrégation entre des patients qui passeraient par le médecin traitant et ceux qui arrivent en accès direct. »
D'autres amendements issus des rangs de la majorité devraient arriver en séance publique (sur le dossier médical, la procédure d'alerte ou la carte Vitale). Sans compter ceux que le gouvernement défendra lui-même ou « téléguidera » par le biais des rapporteurs.
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