BIEN QU'UNE CONSTIPATION chronique ne soit pas en elle-même un élément de gravité, elle peut entraîner des complications propres qui justifient l'intérêt de la mise en place d'un traitement adapté : maladie hémorroïdaire, fissure anale, prolapsus rectal, occlusion intestinale en rapport avec une fécalome, incontinence anale, ulcération rectale, rétention urinaire. L'abus de laxatifs – fréquent chez les constipés chroniques – peut aussi être à l'origine de complications (troubles hydroélectrolytiques, colites) ou d'une accoutumance incitant à majorer les doses. Avant toute chose, il est essentiel de savoir reconnaître une véritable constipation. Patients et médecins ne définissent pas, en effet, la maladie de la même façon. Ces derniers se réfèrent aux critères de Rome III qui doivent inclure deux éléments parmi les suivants : effort d'évacuation, selles dures, sensation de blocage ou d'obstruction ano-rectale, nécessité de manoeuvres manuelles pour faciliter la défécation, moins de trois selles par semaine. Pour les patients, des selles trop dures ou difficiles à évacuer sont synonymes de constipation. Pour les experts de la SNGE, il est important de prendre en compte non seulement les symptômes, mais aussi la perception subjective du malade. Il est ainsi possible de diagnostiquer une constipation si les selles sont trop peu fréquentes (moins de trois fois par semaine), difficiles à exonérer et s'accompagnant d'une sensation d'exonération incomplète, ou lorsque ces deux symptômes coexistent.
Devant une constipation simple, les experts ont estimé qu'il n'est pas nécessaire de demander la réalisation d'un bilan biologique avant de proposer la mise en place d'un traitement laxatif. Néanmoins, il existe des signes de gravité qui doivent imposer de rechercher une cause organique chez un patient souffrant de constipation chronique : antécédents personnels de cancer gynécologique, rectorragies, anémie, recherche de sang dans les selles positive, perte de poids, constipation sévère, persistante ne répondant pas au traitement, enfin, aggravation d'une constipation chronique sans cause évidente.
Lorsque le diagnostic est posé, une prise en charge doit être instaurée en collaboration avec la patiente, mais on sait aujourd'hui que seule une personne constipée sur trois ose en parler à son médecin.
Hygiène de vie.
La place des modifications de l'hygiène de vie a un impact limité sur la constipation, en dehors de la majoration progressive de la teneur en fibres de l'alimentation. En huit à dix jours, il est possible de faire passer sa consommation quotidienne de 15 à 40 g par jour en privilégiant les céréales (pain complet 8,5 g de fibres pour 100 g, riz complet 4,5 g), les légumes (poireaux 4 g, petits pois 12 g, pois cassés 23 g, flageolets 25 g) et les fruits secs (raisins 7 g, dattes 9 g, pruneaux 17 g). Il est possible d'y associer un traitement laxatif : laxatifs osmotiques qui modifient la consistance des selles, laxatifs de lest qui retiennent l'eau dans la lumière intestinale, laxatifs émollients qui lubrifient le bol fécal et laxatifs stimulants qui majorent le péristaltisme intestinal. Si ce traitement est un succès, il n'est alors pas recommandé d'effectuer des examens complémentaires ; dans le cas contraire, il est licite de prescrire un bilan biologique (glycémie, calcémie, créatininémie, NFS, CRP, dosage des hormones thyroïdiennes) et une analyse du transit associé à une manométrie ano-rectale.
D'après une communication du Pr Philippe Ducroté, CHU Rouen.
Frexinos J, Denis P, Allemand H et coll., Descriptive study of digestive functional symptoms in the French general population. « Gastroenterol Clin Biol » 1998 ; 22 : 785-791.
Piche T, Dapoigny M, Bouteloup C et coll., Recommandations pour la pratique clinique dans la prise en charge et le traitement de la constipation chronique de l'adulte. « Gastroenterol Clin Biol » 2007 ; 31 : 125-135.
Les causes de constipation
Chez les personnes souffrant de constipation chronique, le bilan initial permet d'éliminer les étiologies organiques et de poser un diagnostic de constipation fonctionnelle idiopathique en rapport soit avec des problèmes d'évacuation, soit avec des problèmes de transit.
Les difficultés à l'évacuation à l'origine d'une constipation imposent le plus souvent le recours à des manoeuvres manuelles (locales ou pression pelvienne). Elles représentent 30 % des constipations. Leurs causes sont diverses : dysynergie ano-rectale, périnée descendant, entérocèle, prolapsus rectal. Les constipations fonctionnelles liées à un temps de transit colique allongé se traduisent par une progression lente du contenu intestinal tout au long du cadre colique. Cliniquement, cette pathologie est à l'origine de selles rares et dures. Seulement 25 % des constipations sont en rapport avec un allongement du temps de transit colique.
Mais, actuellement, près de la moitié des constipations trouvent leur origine dans l'association de plusieurs facteurs : une pathologie chronique, un traitement favorisant, une baisse de l'activité physique, une alimentation inadaptée et une hydratation insuffisante.
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