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DU PREMIER établissement d'un lien entre le souffle et les poumons à la description des maladies professionnelles pulmonaires en passant par la découverte des méfaits du tabac ou du traitement de la tuberculose, l'histoire médicale de la respiration accompagne celle de notre société. De la pneumonie de la peste à forme bubonique à la menace plus récente du Sras, de la grippe aviaire ou de la guerre bactériologique, l'air peut être menaçant, générant des réactions plus ou moins rationnelles, comme le raconte Paul Léophonte, qui conclut sur ces mots de Pasteur à la tribune de l'Académie nationale de médecine : « A la fin, Messieurs, ce sont les microbes qui auront le dernier mot ! »
Il peut être menacé aussi. En témoigne la pollution atmosphérique croissante. Mais notre société industrielle, capable de générer le scandale de l'amiante, la pollution de l'air intérieur et extérieur, est aussi celle qui a su, depuis plus d'un siècle, liquéfier l'oxygène pour le mettre en bouteille et l'utiliser en thérapeutique, qui propose et réussit des transplantations pulmonaires.
Plusieurs auteurs proposent ainsi une intéressante lecture historico-sociologique de ces épopées et aventures, savamment et ludiquement illustrées.
Émotions et souffle.
La deuxième partie de l'ouvrage est consacrée au regard des artistes, écrivains, musiciens, cinéastes sur le souffle et à son aspect symbolique. La symbolique du souffle est présente dans tous les textes fondateurs. Qu'il s'agisse du souffle divin créateur de vie, de l'esprit latin ( spiritus) synonyme de souffle, d'air et d'âme, du zazen ou du zen des bouddhistes, du Rouah de la tradition juive, la deuxième âme de l'arbre de vie, qui, dans son souffle, rapproche ou sépare de Dieu, la respiration est au cœur de la vie spirituelle comme de la physiologie. Comme l'explique Claude Piperno, l'interprétation de la respiration sous un angle métaphysique permet de comprendre comment et pourquoi le Respir est considéré par certains comme un pont entre les mondes, un mode de circulation dans tous les niveaux de l'être. N'y a-t-il pas d'ailleurs une analogie frappante entre l'image inversée de l'arbre pulmonaire (ensemble trachée-bronches-poumons) et l'arbre de vie ?
La « balade sémantique » proposée par Bernard Pigearias à partir des deux expressions, esprit et souffle, partageant la même origine grecque est un régal ; elle nous promène de notre premier cri de nourrisson au dernier soupir du mourant en passant par le soupir du soupirant, le souffle de l'acteur, l'air de la cuisine, qui permet de transformer la pomme de terre en soufflé, l'inspiration de l'écrivain ou l'émotion qui coupe le souffle.
Nicolas Postel-Vinay évoque un certain nombre de ces témoignages d'écrivains sur les maladies respiratoires, de cette littérature qui mieux qu'un spiromètre, parvient à transmettre « la souffrance des hommes au souffle coupé », qu'il s'agisse de celle de Gide ou du héros de Paul Gadenne évoquant leur tuberculose, ou moins tragiquement de la description d'une apnée du sommeil par San-Antonio. Des mots, le lecteur pourra passer à loisir aux images de cinéma ou de bande dessiné, avec d'intéressantes digressions sur la place du tabac dans l'un et l'autre de ces modes d'expression, place parfaitement représentative de l'air du temps !
Sous la direction de Jean-Paul Orlando, Nicolas Postel-Vinay, « Le souffle magnifié. Regard culturel sur la respiration », Imothep (www.imothep.com), 208 pages, 35 euros.
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