FACE A UN ulcère de jambe, une recherche étiologique est indispensable. Cliniquement : certains signes peuvent déjà orienter vers une étiologie veineuse : son caractère superficiel, sa localisation entre la cheville et le tiers inférieur du mollet, l'association à un œdème de la cheville, des télangiectasies, des varices, de l'eczéma, une dermite ocre, des bourgeons ou une atrophie blanche de la peau. Même si l'origine veineuse est probable, il faut toujours rechercher une artérite associée, relevant d'une prise en charge spécifique. L'existence de facteurs de risque cardio-vasculaire (tabagisme, hypertension artérielle, diabète, hypercholestérolémie...) est un argument en faveur d'une artérite oblitérante des membres inférieurs (Aomi), mais il y en a d'autres, comme l'existence de lésions athéromateuses connues et/ou l'abolition de pouls périphérique. Autre indicateur intéressant : l'index de pression systolique (IPS), qui est le rapport entre la tension prise au niveau du pied et du bras. Un IPS entre 0,9 et 1,3 est considéré comme normal (on est alors en présence d'un ulcère veineux pur), alors qu'un IPS compris entre 0,7 et 0,9 indique l'existence d'une Aomi et, donc, d'un ulcère mixte à prédominance veineuse.
L'échographie-Doppler veineuse est indispensable.
De réalisation simple et non traumatisante, l'écho-Doppler veineux permet de confirmer l'origine veineuse de l'ulcère et, surtout, d'en préciser le mécanisme : reflux, obstruction d'une veine ou déficience de la pompe. Une écho-Doppler artérielle est également utile lorsqu'on a des raisons de suspecter une participation artérielle. Enfin, si, malgré ces examens, il persiste le moindre doute quant à l'origine de cet ulcère, il ne faut pas hésiter à biopsier sa périphérie pour éliminer un carcinome.
Le traitement de la cause.
En cas d'origine veineuse pure, le premier traitement de l'ulcère est la compression qui favorise la chasse et le retour veineux. Quelle que soit la technique utilisée (bandes à étirement court, bandes élastiques à étirement long et réservées à la journée, bas élastiques...), l'essentiel est d'obtenir une pression comprise entre 30 et 40 mmHg à la cheville. Comme le patient doit porter une compression vingt-quatre heures sur vingt-quatre, il faut aussi tenir compte de son observance et adapter sa prescription au cas par cas. La place de la chirurgie est plus modeste ; elle est utile chez les patients qui présentent un reflux superficiel documenté à l'écho-Doppler, mais sans obstruction ni reflux des veines profondes (sinon, cette mesure est inutile), et qui ont un IPS supérieur à 0,85. En cas de reflux profond associé, la décision est prise au cas par cas, après discussion avec l'angéiologue.
En cas d'ulcère mixte, l'artérite doit être prise en charge de façon spécifique, et un avis chirurgical doit être demandé. Lorsqu'une désobstruction chirurgicale n'est pas possible, il faut trouver un compromis pour la compression, qui doit rester efficace, mais ne pas risquer d'aggraver l'Aomi.
Activité physique et hygiène de vie dans tous les cas.
L'activité physique et le maintien d'une bonne hygiène de vie sont essentiels dans tous les cas. La pratique d'exercices réguliers favorise un bon retour veineux et améliore parallèlement le diabète et l'hypertension artérielle éventuellement associés. Quant à l'hygiène de vie (alimentation équilibrée, surveillance du poids, sevrage tabagique...), elle est indispensable pour éviter l'aggravation d'une éventuelle Aomi.
Parmi les autres mesures, il est utile de rappeler au patient qu'il doit laver quotidiennement l'ulcère à l'eau et au savon, pour éviter la formation de foyers infectieux. En outre, la lutte contre l'œdème, la stérilisation d'un foyer infectieux, le recours à des pommades anesthésiques lors de soins douloureux sont autant de mesures qui permettent de lutter contre la douleur, très présente dans l'ulcère. Mais contrairement à une idée reçue, il n'est pas conseillé d'effectuer des prélèvements systématiques de l'ulcère en l'absence de signes cliniques évocateurs, car l'expérience montre que ces plaies sont souvent colonisées par des germes bien tolérés.
* CHU de Caen et membre du Comité d'organisation des recommandations de la HAS pour la prise en charge de l'ulcère de jambe à prédominance veineuse.
(1) Recommandations pour la pratique clinique. Prise en charge de l'ulcère de jambe à prédominance veineuse hors pansement. Haute Autorité de santé. Juin 2006
Ne jamais se fier aux apparences
L'ulcère veineux est défini par une plaie de la jambe qui ne cicatrise pas depuis plus d'un mois (sauf en cas de récidive, où le diagnostic peut être porté plus rapidement) et dû à une hyperpression veineuse ambulatoire (ulcère veineux pur) ou à un mécanisme préférentiellement veineux (ulcère mixte). Selon des études épidémiologiques réalisées à l'étranger, l'ulcère veineux aurait une prévalence comprise entre 0,45 et 0,63 %. Sa prévalence augmente avec l'âge : 0,1 % avant 60 ans, plus de 2 % après 80 ans. Rechercher sa nature est essentiel, car il ne faudrait pas passer à côté d'un autre diagnostic, comme un mélanome ulcéré, par exemple.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature