AUJOURD'HUI s'achève donc la concertation sur le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). Officiellement.
En réalité, les tractations continuent. Avec le ministère de la Santé, mais pas seulement. Une fédération hospitalière confirme : «Nous avons vu l'Élysée, le ministère, nous allons voir Matignon.»
Les lignes du texte bougent encore. Puisque Nicolas Sarkozy s'est récemment réaffirmé comme le pilote de la réforme, aucune porte n'est négligée pour éclaircir les zones d'ombre, nombreuses, du projet de loi. Mais ceux qui ont leurs entrées à l'Élysée n'y voient pas forcément plus clair aujourd'hui. «Les grandes lignes de la réforme sont stabilisées, mais les aspects catégoriels ne sont pas calés, estime un patron d'hôpital . On a l'impression que les arbitrages ne sont pas encore rendus. Personne n'est en mesure de répondre à nos questions. Et la copie finale du texte, nous ne l'avons toujours pas.»
« Usines à gaz ».
Plusieurs points, et pas des moindres, restent flous aux yeux des professionnels. Les agences régionales de santé (ARS) sont taxées d'usines à gaz. Il se dit que leur mise en place, irréaliste pour 2010, serait reportée à 2012. Les communautés hospitalières de territoire (CHT), selon qu'elles seront ou non obligatoires, n'auront pas le même visage. «La doctrine n'est pas écrite à ce sujet», relève un hospitalier. Les médecins libéraux craignent d'être « étatisés ». À l'hôpital public, les futurs contrats médicaux ont des contours encore vagues. Présidents de CME et élus se sentent mis sur la touche. Les directeurs refusent d'être révocables à merci par un directeur d'ARS tout puissant. De leur côté, les hôpitaux privés non lucratifs n'en reviennent toujours pas d'être « oubliés » par la loi.
Qui a obtenu gain de cause au terme de cette concertation éclair ? Difficile à dire. «Le ministère de la Santé nous a écoutés avec attention, mais nous sommes repartis sans promesse», déplore une figure du syndicalisme médical. Un autre se montre tout aussi dubitatif : «Le projet de loi, mal ficelé au départ, contient des maladresses qui risquent de nous démotiver. L'Élysée a une vision comptable, dure, dogmatique, une vision qui a peu évolué en un an. Or on ne gouverne pas un hôpital comme une préfecture.Le ministère de la Santé est plus ouvert, car c'est lui qui gérera la casse ensuite. Dans ce jeu d'acteurs compliqué, impossible de savoir quidécide.» Un troisième syndicaliste n'hésite pas à parler d' «errements au ministère de la Santé».
Face à ce flot d'attaques continu, le ministère de la Santé affirme être au clair avec ses intentions. Quand bien même l'avant-projet de loi, entre les murs du Conseil d'État depuis le 23 septembre, subit chaque jour encore des modifications. «Des détails», rassure le cabinet de la ministre. Le calendrier, lui, est un peu décalé. La grand-messe de clôture pilotée par Roselyne Bachelot en présence de tous les partenaires consultés, prévue après-demain, est reportée, de même que le passage en conseil des ministres, annoncé maintenant pour le 15 ou 22 octobre. «Le texte a été transmis trop tardivement au Conseil d'État», se justifie le ministère de la Santé.
Procédure d'urgence ?
Le projet de loi sera débattu au Parlement «avant la fin de l'année», a toutefois confirmé Roselyne Bachelot ces jours-ci. Une procédure d'urgence est envisagée pour raccourcir les délais. Députés et sénateurs pourraient boucler la lecture du texte en 15 jours.
Au vu de l'ambiance actuelle, la bataille des amendements devrait porter son nom à merveille. Le gouvernement entend en porter un certain nombre pour répondre à diverses revendications. Les parlementaires ne seront pas en reste. «Ils n'ont pas du tout été consultés jusqu'à présent, mais ils seront très actifs lors de l'examen de la loi», glisse un observateur, qui croit savoir que des députés UMP comptent s'opposer à ce que les préfets président les ARS.
Les lobbies de tout poil ne manqueront pas de jouer leur ultime carte. Déjà, des avertissements surgissent. La FEHAP se dit prête à mobiliser ses troupes pour que la loi Bachelot reconnaisse le secteur PSPH. Entre les hôpitaux privés, l'heure est à l'union sacrée. Idem chez les présidents de CME de CH et de CHU, désabusés. «Le gouvernement prendra ses décisions, nous prendrons nos responsabilités», prévient l'un d'eux. Moins menaçant, mais tout aussi déterminé à se faire entendre, le monde mutualiste déplore de ne jamais avoir été consulté sur la loi Bachelot. Les mutuelles demandent une place au sein des ARS, qui leur est jusqu'à présent refusée.
Le trimestre qui s'annonce a toutes les chances de voir la loi Bachelot évoluer. Au risque de la voir détricotée complètement, redoutent ses plus fervents partisans.
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