Le Registre suédois des cancers, tenu depuis 1958, a donné la possibilité de réaliser une analyse des composants héréditaires présidant à la survenue d'un certain nombre de cancers. Dans le « Lancet », Bernt Lindelöf et Gunnar Eklund (Stokholm) expliquent comment un index familial a été calculé pour chaque site des cancers, à partir des données contenues dans le registre.
Les patients enregistrés ont été classés par site de cancer. Chaque cas a été croisé par année de naissance, sexe et année de décès avec une personne contrôle, sans cancer. Le degré de parenté entre les individus dans une cohorte a été retrouvé en utilisant les informations du Registre de la population totale.
Un total de 1 283 047 cancers ont été identifiés chez 1 173 648 patients et divisés en 54 cohortes correspondant aux différents sites. L'index familial a pu être calculé pour 44 sites. Pour la plupart de ces sites, on constate un excès de risque de cancer dans les apparentés au premier degré des proposants, c'est-à-dire un index familial supérieur à un.
L'existence d'un excès de risque familial pour les cancers des yeux, des testicules et de la glande thyroïde est connu.
L'excès de risque familial de maladie de Hodgkin a surpris les auteurs.
Pour tous les sites combinés, le nombre des membres d'une famille affectés dans la cohorte du cancer moins ce nombre dans la cohorte contrôle est de 5 218 (l'index familial pour tous les cancers confondus est de 1,06). « Il est remarquable de constater le petit nombre de Suédois nés entre 1932 et 1997 et qui ont eu un parent ou un enfant ou un frère souffrant du même cancer que lui », remarquent les auteurs.
Un risque relatif entre 1,5 et 3
Le risque relatif de cancer chez les apparentés du premier degré s'étage entre 1,5 et 3 pour la plupart des cancers.
Il existe probablement une sous-estimation de l'index familial, pour les cancers du sein (IF de 1,5), cutanés non mélanomateux (IF de 1,6) et utérins (de 2), estiment les auteurs. A l'inverse, on pense que l'IF des cancers du col (1,7) et de la prostate (2,7) est surestimé.
Il existe trois méthodes d'identification des facteurs génétiques des cancers. La plus courante consiste en l'identification clinique de cas « proposants » avec les autres individus affectés dans un arbre généalogique. Elle présente les désavantages du nombre réduit des cas et du risque de biais.
Deuxième méthode, les études de jumeaux rendent possibles l'étude de la contribution de gènes hérités. Mais les jumeaux sont rares et même les registres de jumeaux les plus importants ne permettent une estimation du risque que pour les cancers les plus fréquents.
La troisième méthode consiste à évaluer le nombre de cas observés en relation avec le nombre de cas attendus. Cette technique peut être utilisée à l'échelle d'une région et d'une population, avec une possibilité de faire le lien entre les cas de cancer et les relations familiales. Ce calcul présente l'avantage de permettre d'étudier un grand nombre d'individus, mais il est difficile de faire la part des choses entre les facteurs environnementaux et génétiques.
Les liens familiaux étaient connus
La force de l'étude présentée par Lindelöf et Eklund tient au grand nombre de cas qui étaient obligatoirement enregistrés dans une population vaste et dont les liens familiaux étaient connus.
Il existe une limite : l'incapacité à faire la distinction entre les effets génétiques et les facteurs environnementaux pour expliquer les agrégations familiales des cancers.
Les auteurs se sont appuyés pour cela sur la « Nordik Twin Study », qui indique que les effets de l'environnement sont négligeables ou très faibles, sauf pour la langue, le col et l'utérus.
« Notre étude comprend plusieurs générations et donc plusieurs types d'exposition », soulignent les auteurs. Les habitudes pour le tabagisme, la contraception et les facteurs diététiques sont différents d'une génération à l'autre.
« Lancet », vol. 358, 17 novembre 2001, pp. 1696-1698.
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