Depuis leur mise sur le marché voici environ quinze ans, les prescriptions de statines ont progressé chaque année de près de 20 % en moyenne, selon l'assurance-maladie. En 2004, leur développement est resté soutenu avec des prescriptions en hausse de 11 %, soit deux fois plus que l'augmentation moyenne de l'ensemble des médicaments. Or la nouvelle convention médicale, signée le 12 janvier dernier, prévoit un engagement de maîtrise médicalisée en matière de prescription de statines, avec l'objectif de parvenir à la fin de 2005 à une baisse de 1,5 % des dépenses de remboursement de ces médicaments anticholestérol. En inversant la tendance - les statines constituant la première classe thérapeutique qu'elle rembourse (plus de 1,1 milliard d'euros en 2004) -, l'assurance-maladie escompte une économie de l'ordre de 161 millions d'euros d'ici à la fin de 2005.
Dans ce contexte, la Cnam (Caisse nationale d'assurance-maladie) a décidé d'appuyer là où ça fait mal. Elle ressort une étude publiée à la fin de 2003 (« le Quotidien » du 9 décembre 2003) et qui montre que 60,7 % des patients nouvellement traités ne présentent qu'un risque cardio-vasculaire faible, alors que l'Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) recommande de ne pas utiliser de statines dans ce cas, et de leur préférer un traitement diététique. Selon cette même étude, 53,4 % des patients traités aux statines n'ont suivi aucun régime alimentaire préalable à la mise en place du traitement. Enfin, dans les deux tiers des cas, la prescription de ces médicaments hypolipémiants s'est faite sans tenir compte des seuils de LDL cholestérol définis par les experts.
Mauvais élève.
Autant de paramètres qui font de la France un mauvais élève européen en matière de prescription de statines.
Les Français ont en effet consommé en moyenne 450 milligrammes de statines par an et par personne, contre 350 pour les Britanniques et 300 pour les Allemands. Mais le problème ne vient pas seulement de la prescription, et l'assurance-maladie note que les laboratoires pharmaceutiques proposent en France des conditionnements de statines qui ne paraissent pas adaptés aux recommandations de l'Afssaps. En prévention primaire avec moins de trois facteurs de risque, les doses de statines recommandées par l'autorisation de mise sur le marché (AMM) et l'Afssaps sont en effet de 10 milligrammes par jour, alors que la grande majorité des statines mises sur le marché (comme la pravastatine ou la simvastatine) sont dosées à 20 milligrammes au minimum. Si bien qu'en France 90 % des prescriptions de ces deux molécules sont actuellement à 20 milligrammes, les médecins ne proposant que très rarement au patient de couper en deux le comprimé. « Nous devons travailler avec les médecins et l'industrie pharmaceutique pour optimiser l'utilisation de ces médicaments », indique Frédéric van Roekeghem, le directeur de la Cnam.
Enfin, contrairement à ses voisins d'outre-Rhin et d'outre-Manche, la France ne compte actuellement aucune statine génériquée, ce qui alourdit les comptes de l'assurance-maladie. Pourquoi cette particularité ? Parce qu'en France les premières statines ont été commercialisées plus tard qu'ailleurs. Les premiers génériques de la simvastatine devraient toutefois y être disponibles dès le début du mois prochain.
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