Le suicide est la cause d'une mort prématurée chez les schizophrènes : de 9 à 13 % des patients atteints de schizophrénie ou de troubles schizo-affectifs meurent par suicide, 50 % font des tentatives de suicide qui dans la majorité des cas nécessitent des hospitalisations.
A titre de comparaison, aux Etats-Unis, le risque de suicide dans la population générale est de 1 % et de 9 à 15 % chez les personnes souffrant de troubles de l'humeur, précise le Dr Herbert Meltzer (Etats-Unis).
Différents facteurs de risque de suicide sont invoqués : la dépression, facteur de risque majeur, mais aussi la prise de conscience du handicap induit par la schizophrénie, son retentissement sur la vie socio-professionnelle, les idées délirantes qui résistent à toute logique et peuvent déclencher une agressivité dirigée contre les autres ou contre les patients eux-mêmes, les toxicomanies souvent associées.
Différentes études montrent que les traitements antipsychotiques typiques sont efficaces sur les symptômes positifs de la schizophrénie mais n'ont pas d'effet sur l'incidence des suicides, et qu'il n'y a pas de différence significative de comportement suicidaire entre les patients réfractaires aux neuroleptiques et les répondeurs.
Un antipsychotique atypique
En revanche, plusieurs autres essais suggèrent que la clozapine, un antipsychotique atypique (sans effet neuroleptique, type parkinsonien), peut diminuer le risque de suicide chez les schizophrènes.
Cependant, il s'agissait d'études rétrospectives qui ne permettaient pas d'établir des différences possibles entre la clozapine et les autres antipsychotiques atypiques sur la réduction du risque de suicide, les posologies, les traitements associés et le rythme de surveillance.
Pour pallier ces limites, une étude internationale (11 pays), multicentrique (67 centres), randomisée, en groupes parallèles (InterSePT), a été conçue pour comparer la réduction du risque suicidaire obtenue avec la clozapine et l'olanzapine chez des patients schizophrènes ou souffrant de troubles schizo-affectifs confirmés (DSM-IV) suivis pendant deux ans.
InterSePT
Neuf cent quatre-vingts patients (609 schizophrènes, 371 avec des troubles schizo-affectifs) hommes et femmes, âgés de 18 à 65 ans, réfractaires pour 26,8 % d'entre eux au traitement neuroleptique antérieur, et considérés comme des patients à haut risque de suicide en raison d'antécédent de tentative de suicide ou d'idées suicidaires, ont été inclus dans l'étude.
Après randomisation, 490 patients ont reçu la clozapine (274,2 + 155 mg par jour), 490 l'olanzapine (16,6 + 6,4 mg par jour). Chaque patient était vu en consultation une fois par semaine pendant six mois et toutes les deux semaines pendant dix-huit mois. A chaque visite, le comportement suicidaire était évalué.
Les critères principaux de l'étude étaient le nombre de tentatives de suicide, y compris ceux qui ont entraîné la mort, les hospitalisations pour prévenir le suicide et une importante aggravation du comportement suicidaire par rapport à l'état initial.
L'analyse des résultats met en évidence la supériorité de la clozapine sur l'olanzapine quant à la réduction du nombre de tentatives de suicide (34 vs 55 ; P =.03), d'hospitalisations (82 vs 107 ; P =.05), d'interventions de secours (118 vs 155 ; P =.01) pour prévenir le suicide et de traitements antidépresseurs (221 vs 258 ; P =.01) ou sédatifs et/ou d'anxiolytiques (301 vs 331 ; P =.03) associés.
Etre suivis en ambulatoire
Ces résultats suggèrent que chez les patients à haut risque, le recours à la clozapine pourrait entraîner une réduction significative du comportement suicidaire. En outre, le risque de suicide étant aujourd'hui une des principales indications d'hospitalisation des patients schizophrènes ou atteints de troubles schizo-affectifs, ces résultats suggèrent également qu'une plus large utilisation de clozapine pourrait leur permettre d'être suivis en ambulatoire, réduisant ainsi le coût de leur prise en charge.
Aux Etats-Unis, la clozapine a reçu de la FDA l'autorisation de traitement en première intention chez les schizophrènes à risque suicidaire, en France l'indication reste actuellement les schizophrénies chroniques sévères en cas de résistance ou d'intolérance majeures aux neuroleptiques classiques.
Vidéoconférence Internet, organisée par les Laboratoires Novartis Pharma, retransmise en direct de la Vanderbilt University, Nashville, Tennessee, Etats-Unis. Commentaires : Dr Herbert Meltzer, principal investigateur de l'étude InterSePT. Commentaire et analyse française : Pr Marc Bourgeois.
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