PLUSIEURS études observationnelles l'avaient déjà suggéré : la prévalence de l'infection par le VIH est plus faible chez les hommes circoncis. L'observation a ensuite été corroborée par les résultats de deux essais randomisés menés par les instituts nationaux de la santé (National Institutes of Health-NIH) à Kisumu, au Kenya, et dans le district de Rakai, en Ouganda : le risque d'infection par le VIH était diminué respectivement de 53 et 51 % (« le Quotidien » du 15 décembre 2006). Un précédent essai d'intervention, financé par l'Anrs (Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales) en 2005, avait déjà démontré que le risque de transmission du VIH chez les hommes circoncis pouvait être réduit de 60 %.
A la demande de l'OMS et de l'Onusida, des experts représentants toutes les parties concernées (chercheurs, gouvernements, membres de la société civile, défenseurs des droits de l'homme, militants de la santé des femmes, des jeunes, représentants des institutions de financement) se sont réunis pendant trois jours, du 6 au 8 mars, à Montreux (Suisse).
L'objectif de cette consultation internationale était d'examiner les résultats des trois essais et de vérifier les informations sur l'efficacité, la sécurité et l'acceptabilité de la circoncision pour la prévention du VIH. Une dizaine de conclusions suivies de recommandations ont été formulées.
Un pas en avant.
Les résultats, déclarent d'emblée les experts, sont convaincants. «L'efficacité de la circoncision sur la réduction de la transmission du VIH de la femme à l'homme a été démontrée sans aucun doute raisonnable possible. C'est une date importante dans l'histoire de la prévention du VIH», affirment-ils. Cette première conclusion les conduit à émettre deux recommandations importantes : «La circoncision doit maintenant être reconnue comme une mesure efficace de prévention du VIH» et il faut considérer sa promotion «comme une nouvelle stratégie importante de prévention de la transmission hétérosexuelle du VIH de la femme à l'homme».
Les pays qui enregistrent «des taux élevés d'infection par le VIH par transmission hétérosexuelle et une faible prévalence de la circoncision disposent désormais d'une nouvelle intervention capable de réduire le risque d'infection par le VIH chez les hommes hétérosexuels», a souligné le Dr Kevin De Cock (OMS).
S'ils saluent le «pas en avant» que constitue l'annonce d'une méthode supplémentaire de prévention du VIH, les experts restent prudents. Efficace, la circoncision ne protège pas complètement contre le VIH et ne doit jamais se substituer à d'autres méthodes de prévention à l'efficacité reconnue. Elle doit donc toujours s'insérer dans un ensemble de mesures comprenant : le recul de l'âge des premiers rapports sexuels, les rapports sans pénétration, la diminution du nombre de partenaires sexuels, la promotion et l'utilisation correcte et régulière du préservatif masculin et féminin.
Les autres recommandations touchent aux modalités de la circoncision. Elle doit être réalisée dans de bonnes conditions d'asepsie, avec un équipement adapté et par des praticiens compétents et formés. En fonction du groupe d'âge qui aura reçu la priorité, les bénéfices attendus seront plus ou moins rapides. «Les garçons et les jeunes gens encore sexuellement inactifs sont un groupe relativement aisé à atteindre, mais il faudra probablement attendre dix ans pour que les résultats soient mesurables», expliquent les experts. Si la priorité est donnée aux adolescents plus âgés et aux hommes de 30 ans et moins, l'effet sera plus rapide. La circoncision des nouveau-nés, plus simple et moins risquée, «doit aussi être envisagée comme une stratégie à long terme pour promouvoir la circoncision dans la population générale».
Dans tous les cas, le consentement éclairé des intéressés ou de leurs parents devra être obtenu. Un délai d'abstinence devra être observé pendant au moins six semaines après l'intervention jusqu'à la cicatrisation de la plaie (vérifiée dans l'idéal par un examen médical). La circoncision n'est pas recommandée pour les hommes séropositifs ; mais, s'ils la demandent, elle ne doit pas leur être refusée.
Les experts précisent que «la circoncision est très différente de la mutilation sexuelle féminine» et insistent sur l'information, la prise en compte du contexte socioculturel et la nécessité de poursuivre les recherches, notamment en ce qui concerne la transmission homme-femme.
On ignore si la circoncision réduit la transmission sexuelle du VIH de l'homme à la femme.
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