LE RISQUE de mortalité à 30 jours dans les suites d'un infarctus – qui actuellement s'établit entre 5 et 6 % – pourrait encore être abaissé. Il semblerait, en effet, que le concept de postconditionnement, développé depuis 2005 par deux équipes françaises (Prs Christophe Piot, CHU de Montpellier, et Michel Ovize, Hospices civils de Lyon), soit applicable en pratique grâce à l'utilisation de ciclosporine.
Ces chercheurs travaillent sur les lésions myocardiques induites par la reperfusion tissulaire brutale qui survient au cours des différentes techniques de reperfusion (thrombolyse ou angioplastie). « Chez l'animal, les phénomènes d'apoptose cellulaire induite secondairement peuvent représenter jusqu'à 50% de la taille finale de l'infarctus », précise au « Quotidien » le Pr Piot. Les premiers essais thérapeutiques visant à prévenir ces lésions ont tous été des échecs (antioxydants, inhibiteurs calciques, anti-inflammatoires).
Un postconditionnement pharmacologique.
Mais les deux équipes françaises ne se sont pas découragées. Elles ont d'abord analysé les phénomènes physiopathologiques mis en jeu dans ce processus. Des études animales ont prouvé le rôle central de la mitochondrie et, en particulier, de sa membrane, qui peut devenir perméable par le biais d'une dysrégulation du pore de transition de perméabilité mitochondriale. En outre, les Prs Piot et Ovize ont voulu prouver chez l'homme la réalité du concept de postconditionnement.
En 2008, ils ont publié un travail chez 58 patients montrant que la réalisation d'une angioplastie avec interruption brève et répétée du flux sanguin (en gonflant et dégonflant le ballonnet) permet de limiter la taille des lésions myocardiques. Mais ils n'ont pas perdu de vue l'idée d'un postconditionnement pharmacologique. Ils ont eu l'idée de tester, après des études animales, la ciclosporine chez l'homme. Cette molécule bloque en effet la voie de signalisation impliquée dans le fonctionnement du pore de transition mitochondrial qui reste occlus tout au long de la phase ischémique et qui s'ouvre en début de reperfusion lorsqu'il existe un afflux en calcium et en phosphates.
«Nous avons choisi d'utiliser un protocole évaluant l'intérêt d'une injection unique de 2,5mg/kg de ciclosporine sur la table de coronarographie associée au traitement optimal de l'infarctus. Les 58patients inclus dans l'étude en double aveugle devaient souffrir d'infarctus du myocarde ST+, ils pouvaient avoir subi au préalable une thrombolyse à condition que le flux coronarien n'ait pas repris (TIMI 0). Le traitement par ciclosporine a permis de réduire la libération de créatine kinase de 44% et de troponineI de 13%. La taille de l'infarctus mesurée 5jours après l'accident était en moyenne abaissée de 40% », analyse le Pr Piot.
Dans un proche avenir, d'autres études utilisant l'EPO et une ciclosporine sans effets immunosuppresseurs devaient être mises en place. Des travaux préhospitaliers devaient aussi débuter très rapidement.
« New England Journal of Medicine », vol 359; 5: 473-480.
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