Il est capital que les urgences vitales représentées par toute détresse immédiate pouvant conduire à un arrêt cardiaque puissent être prises en charge le plus précocement possible. De fait, il existe des recommandations internationales en ce sens, dont la dernière mise à jour remonte à 2000. Parallèlement, en 1991, le concept de chaîne de survie a été lancé par les experts internationaux dans le but de sensibiliser le grand public et les professionnels de santé à cette problématique. Initialement conçu pour le milieu extrahospitalier, ce n'est qu'en 1997 que ce concept a fait l'objet de recommandations prenant en compte la spécificité de la réanimation cardio-pulmonaire intrahospitalière, expliquant le retard dans la mise en place d'une chaîne de survie au sein même des structures hospitalières.
Les quatre maillons indispensables
Elaboré conjointement par l'American Heart Association (AHA) et l'European Resuscitation Council (ERC), le concept de chaîne de survie s'adresse à la réanimation cardio-respiratoire, même s'il peut être appliqué à tous les types d'urgence vitale. La chaîne de survie est constituée de quatre maillons correspondant à différentes étapes de la prise en charge dont la précocité de mise en place est essentielle au succès thérapeutique. Le premier maillon est l'alerte des services d'urgences par les premiers témoins. Le deuxième est la réanimation cardiorespiratoire (RCP) proprement dite. Le troisième maillon est la défibrillation lorsqu'elle est indiquée (seul traitement des fibrillations ventriculaires et des tachycardies ventriculaires inefficaces). La dernière étape est celle de la réanimation spécialisée, y compris la réanimation après récupération d'une activité cardiaque. Cette chaîne doit être envisagée quel que soit le lieu de survenue de l'arrêt cardiaque dans l'enceinte de l'hôpital : services d'hospitalisation, mais aussi salles d'investigation, halls, cafétérias, extérieurs, etc.
Un manque de données épidémiologiques
On sait que la mort subite concerne, en France, plus de 40 000 personnes par an avec un pronostic particulièrement sombre, puisque moins de 3 % des patients survivent dans un état neurologique correct, mais qu'en est-il à l'hôpital ? Alors qu'on pourrait s'attendre, d'une part, à l'existence de données épidémiologiques plus consistantes et, d'autre part, à un meilleur pronostic des arrêts cardiaques, la réalité apparaît moins évidente. Il n'existe en effet aucune évaluation ayant pu confirmer la plus grande rapidité de la mise en route d'une RCP à l'hôpital et les études épidémiologiques sont rares. La survie paraît certes supérieure à l'hôpital qu'à l'extérieur, mais les quelques données disponibles n'en sont pas moins approximatives et divergentes. D'où la nécessité de conduire des travaux épidémiologiques sérieux dans ce domaine afin de disposer de données exploitables.
La chaîne de survie : un concept à améliorer à l'hôpital
S'appuyant sur les recommandations américaines de 1997, Pierre-Yves Gueugniaud et son équipe ont élaboré des propositions concernant les différents maillons de la chaîne, adaptées aux particularités françaises.
Ainsi, le premier maillon, l'alerte, devrait pouvoir fonctionner grâce à un numéro d'appel unique. Que celui-ci corresponde à un service de réanimation ou d'urgence, à la régulation du SAMU ou du SMUR de l'établissement, l'essentiel est d'obtenir le déclenchement instantané d'une intervention 24 h/24. La mise en place d'une procédure écrite et affichée apparaît également capitale, de même qu'une information du personnel hospitalier.
De plus, la connaissance des gestes élémentaires de survie par le personnel soignant est très différente d'un service à l'autre et d'un établissement à l'autre. Le concept de chaîne de survie impliquant la participation éventuelle de l'ensemble du personnel soignant, il semble souhaitable d'organiser une formation initiale assortie de sessions de recyclage régulières. Dans ce cadre, une formation spécifique à l'utilisation des défibrillateurs semi-automatiques doit être programmée.
Il est également évident que le matériel de réanimation d'urgence doit pouvoir être disponible dans tous les services, si possible sur un chariot mobile, et régulièrement vérifié. Selon les dernières recommandations de 2000, le délai de déclenchement du premier choc électrique en cas de fibrillation ventriculaire ne doit pas être supérieur à 3 ± 1 minutes pour la majorité des arrêts cardiaques intrahospitaliers : une répartition harmonieuse des défibrillateurs semi-automatiques en différents points de l'établissement permettrait d'assurer ces délais. Quant à l'équipe de réanimation spécifique à l'urgence intrahospitalière, qui doit comporter au minimum deux personnes, elle est supposée être mobile et disponible en permanence, qualités seules garantes d'un raccourcissement des délais d'intervention.
Par ailleurs, selon le modèle du « do-not-attempt-resuscitation order » des Anglo-Saxons, il est aussi important que la décision de réanimer, ou non, fasse l'objet de procédures claires et écrites.
Enfin, recueil uniformisé des données, évaluation régulière de la prise en charge, organisation de la chaîne de survie et de la formation impliquent la désignation d'un comité d'experts. Il paraît également hautement souhaitable que les sociétés savantes concernées élaborent des recommandations françaises concernant la prise en charge des urgences vitales à l'hôpital.
* Service d'anesthésie-réanimation, CHU Lyon-sud.
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